Procès du violeur de Tinder à Paris : lourde peine requise contre un accusé se clamant "seul contre toutes"

Ce jeudi 28 mars 2024, au procès du violeur de Tinder à Paris, l'avocat général a requis une peine de 19 ans de prison à l'encontre de l'accusé.

Les avocates des parties civiles sont venues relater le traumatisme vécu par leurs clientes, victimes du
Les avocates des parties civiles sont venues relater le traumatisme vécu par leurs clientes, victimes du « violeur de Tinder ». (©DR)
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La peine maximale encourue à un an près. Ce jeudi 28 mars 2024, s’est tenu l’avant-dernier jour du procès à Paris de Salim Berrada, alias le “violeur de Tinder”. Devant la cour criminelle de Paris, les avocates des 17 parties civiles sont venues rappeler les souffrances de leurs clientes. De son côté, l’avocat général a requis une peine de 19 ans de réclusion criminelle, ainsi qu’une interdiction définitive de territoire français. 

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La « méthode Berrada » 

Une synthèse de l’horreur. C’est le déroulé de cette matinée, après des jours éprouvants où les 17 parties civiles sont venues raconter les violences sexuelles subies et le traumatisme qui en a découlé. Ce jeudi, une à une, leurs avocates ont réitéré à l’unisson ce que Salim Berrada n’a pas voulu entendre. Des menteuses, non. Des victimes, oui. 

Dans chaque plaidoirie, il y a un dénominateur commun. La “méthode Berrada”, comme l’a nommé l’un des conseils. Une machine manipulatoire où les cinq sens des proies de l’accusé étaient stimulés puis entraînés vers l’abîme. La vue d’abord, celles des photographies de Salim Berrada, qui, accompagnées de ses flatteries, donnaient envie aux victimes de se retrouver devant son objectif. 

L’odeur ensuite, celle nauséabonde de l’appartement de l’accusé, studio photo de circonstance. “Cette odeur qui ne part pas. Cette odeur qui colle”, évoque l’une des avocates. Arrive le goût, celui des shots de vodka caramel proposés par Salim Berrada. Arôme sucré qui annonce le « néant », le « trou noir »de la soumission chimique. Puis c’est le toucher, brutal, de l’accusé s’emparant de l’intimité des victimes devenues des « pantins », des « poupées de chiffon ». « Dans cette affaire, il s’agit ni plus ni moins de viols d’une extrême violence », lance un conseil.

Et parfois, il y a l’ouïe, frappée par le rire de Salim Berrada pendant l’acte. Un rire de domination. “Ma cliente, elle va l’entendre durant des semaines”, gronde son avocate. « Toutes ces femmes, ce sont les réceptacles de sa jouissance perverse, celle d’un petit garçon en manque d’égo », tacle avec dégout Me Marjolaine Vignola, représentant trois victimes 

Des femmes traumatisées 

Il y a le récit glaçant, mais aussi les douloureuses conséquences que sont venues rappeler les plaideuses. Ce sont les grincements de dents permanents de l’une des victimes, ou bien l’alcoolisme de l’autre. C’est Julia*, qui tombe enceinte peu après les faits. “Pendant neuf mois, elle va se demander si son enfant sera le fruit du viol ou de l’amour” s’émeut son avocate. 

Il y a aussi les dépôts de plaintes difficiles et les questions intrusives des enquêteurs. “Ma cliente, elle a confiance en la justice, mais cette confiance, je peux vous dire qu’elle a été mise à rude épreuve”, lance Me Camille Martini. « C’est un procès emblématique du traitement judiciaire des plaintes pour viol », a clamé Me Vignola. La culpabilité n’est également jamais loin : “Tant qu’on devra dire à nos filles de faire attention au grand méchant loup, il y aura de la culpabilité”, a résumé Me Rey-Gascon, représentant quatre victimes. 

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Un mur de déni 

Et enfin, il y a l’audience. Deux semaines, où embarquées sur les mêmes bancs, les victimes ont heurté un mur de déni, celui de l’accusé qui parle d’un complot engendré par un tourbillon médiatique. “Monsieur Berrada, il nous agace”, tancent plusieurs conseils. “Par ses dénégations, il prive ses victimes de se réparer”, tonne Me Martini. “C’est une défense honteuse et pitoyable. Il refuse de se regarder dans le miroir de la réalité que tout le monde lui tend. Il y a une absence d’empathie”, s’étrangle Me Vignola. À l’indignation succède l’inquiétude : « Il y a un risque de récidive élevé », alerte une avocate. 

Seule clarté dans cette obscurité, la solidarité. Celle qu’ont eue les victimes les unes envers les autres, serrées sur les bancs des parties civiles. « J’ai vu les mains de toutes les autres se mettre sur celles de Sarah*, pour lui donner le courage de témoigner. J’ai vu quelque chose de merveilleux. Je les ai vues, elles, ensembles », s’émeut Me Rey-Gascon. Dans plusieurs plaidoiries, on oppose ces bancs, d’où jaillissent les larmes, les cris et parfois les rires, à ce « froid », qui émane du box de l’accusé. 

Une lourde peine requise 

Après les avocates des parties civiles vint le tour de l’avocat général Philippe Courroye. ‘Vous avez vu les victimes raconter leur souillure, mais lui, l’accusé, les a-t-il seulement vues ? Ces quelques mètres, qui séparent le box des bancs des victimes, ce sont des océans, des continents tant les versions diffèrent ». 

Pour le représentant de l’intérêt général et de la société, la culpabilité de l’accusé ne fait guère de doute. « Il a un total sentiment d’impunité. C’est comme un automobiliste qui prend l’autoroute à contresens en klaxonnant ! ». Les dénégations de Salim Berrada ? Balayées par le ministère public : « Ces femmes, vous les avez 17 fois rabaissées, 17 fois flétries par vos mensonges. Regardez-les. Contemplez votre œuvre, ce champ de ruine ». Se tournant vers elles, le représentant de l’accusation a aussi tenu à remercier les parties civiles pour leur courage : « Ce que vous avez fait. Ce n’est pas vain. Vous avez pu l’empêcher de faire d’autres victimes ». 

Après un long réquisitoire, ne négligeant aucun détail, l’avocat général a requis une peine de 19 ans de réclusion criminelle pour les 13 viols et 4 agressions sexuelles dénoncés. « Cet homme est dangereux. Chaque page du dossier le montre. Ce procès, c’est celui de la jeunesse des victimes assassinées. Cette jeunesse, elle attend justice ! », a clamé Philippe Courroye. Le verdict de la cour criminelle est attendu vendredi 29 mars 2024. 

*Les prénoms des victimes ont été modifiés 

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