Discussions d'extrême-droite sur Telegram: un policier du Var condamné à de la prison avec sursis

Membre actif d'un canal de discussion Telegram baptisé "FR DETER 83", un policier adjoint de Fréjus a été condamné jeudi 21 mars par le tribunal correctionnel de Draguignan pour provocation à la haine raciale.

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V. W. Publié le 22/03/2024 à 11:43, mis à jour le 22/03/2024 à 11:43
Suspendu de ses fonctions à la suite de la publication de ses échanges sur le groupe DETER 83, le policier a été condamné à effectuer un stage de citoyenneté. Capture d’écran X/Tajmaât

L’affaire avait fait grand bruit l’an passé, remontant jusqu’aux plus instances de l’Etat.

Un canal de discussion Telegram d’extrême droite baptisé "FR DETER" - pour "Français déterminés" - puis décliné au niveau départemental, avait été mis au jour en avril 2023 par une plateforme collaborative.

"Je ne suis pas raciste"

Créé d’abord dans un but d’échange d’idées identitaires entre sympathisants, FR DETER avait vite dérapé dans l’incitation et la provocation à la haine raciale, comme le prouvent les dialogues captés par le site Tajmaât.

Sur la déclinaison varoise de ce tchat, un policier, pas le moins actif ni le moins virulent, avait été reconnu par ses collègues à la suite d’un reportage télévisé.

Il avait notamment posté une photo de lui porteur d’un gilet tactique siglé "Police". Ce policier adjoint, officiant alors au commissariat de Fréjus, n’avait en outre pas pris la peine d’utiliser un pseudo pour signer ses messages.

Ce jeudi soir, dans l’anonymat du tribunal correctionnel de Draguignan, Guillaume A. est revenu, penaud, sur cette affaire. "Je regrette ces messages, avance-t-il à la barre, ayant choisi de se passer d’avocat. C’était une très grosse erreur de ma part, d’autant plus que je ne suis pas raciste."

La teneur de ses propos sur le tchat laisse pourtant croire le contraire. "One two three, retourne dans ton pays." "Les Arabes? C’est quoi, ça? Connais pas cette espèce. Une sous-race, non?" "Faut leur faire comprendre qu’on est chez nous." "Malheureusement, on est bridé pour certaines actions, mais c’est pas l’envie qui manque pourtant"...

Des conseils pour une ratonnade?

"J’ai suivi le mouvement du groupe, tente de se justifier le prévenu de 23 ans qui a intégré le canal à l’invitation d’une certaine Julie, rencontrée à l’occasion d’un meeting du parti Reconquête. Tout ça, c’était de l’humour très déplacé." Et parfois même des "conseils" pour "le collage de stickers FR DETER" assure-t-il.

Ce n’est donc pas en réaction à des messages appelant à une "ratonnade au Caramy" qu’il aurait suggéré des actions "surtout en zone gendarmerie, ils travaillent rarement la nuit" en ayant pris de soin de se dissimuler, "cache-cou casquette emballé, c’est pesé".

"Je conseillais un étudiant de La Garde qui voulait apposer des stickers mais qui avait peur de se faire prendre, détaille Guillaume. Je lui ai donc dit d’agir de nuit pour ne pas être embêté. Je faisais part de mon expérience de colleur d’affiches pour Reconquête. Quand ma hiérarchie a appris que je collais pour le parti, elle m’a demandé d’arrêter. C’est pour cela que j’ai écrit qu’on était bridé dans nos actions."

Des explications qui ne convainquent pas du tout la représentante du ministère public Estelle Bois. "Dans aucun message n’est mentionné un collage d’affiches ou de stickers. On parle surtout de ratonnade et de casser du bougnoule et vos réponses interviennent à la suite directe. Vous vous moquez du tribunal après vous être montré indigne de vos fonctions."

"Vous avez gravement sali les institutions"

Le policier, aujourd’hui suspendu, peine tout autant à persuader le tribunal qu’il comptait juste se rendre dans les manifestations contre la réforme des retraites "pour ramener les casseurs aux collègues".

"Vous n’évoquez pas des casseurs mais des antifas, poursuit Estelle Bois. Et que d’ailleurs il n’y en a "aucun à se mettre sous la dent dans le Var"... Quel est le but de tout ça? Créer une milice sous-étatique? Pour quelqu’un qui se dit patriote, vous avez gravement sali les institutions. Votre place n’est plus dans la police."

Le tribunal, n’ayant pas le pouvoir de démettre le prévenu de ses fonctions, condamne Guillaume A. à six mois d’emprisonnement avec sursis. Il devra également participer, à ses frais, à un stage de citoyenneté.

"J’ai honte, souffle le jeune homme avant que le tribunal ne se retire. J’ai entaché l’image d’une institution magnifique. Je suis vraiment désolé."

Guillaume, qui ne se fait aucune illusion sur son avenir au sein de la police, a déjà entamé des recherches pour se reconvertir professionnellement.

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Var-Matin

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