Réduire les effets néfastes du traitement du cancer du sein et de l'ovaire

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L'Uni de Genève a découvert pourquoi certaines thérapies tuaient également des cellules saines et comme l'éviter.

Les découvertes faites dans cette étude vont permettre de développer des traitements qui ne détruisent que les cellules cancéreuses.

Les découvertes faites dans cette étude vont permettre de développer des traitements qui ne détruisent que les cellules cancéreuses.

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Certains traitements anticancéreux ne ciblent pas uniquement les cellules tumorales, mais aussi les cellules saines. Si leurs effets sur ces dernières sont trop importants, cela entraîne une limitation de leur utilisation. Une équipe de l’Université de Genève (UNIGE), en collaboration avec la société bâloise FoRx Therapeutics, ont découvert un mécanisme qui permet de conserver l’effet toxique sur les cellules cancéreuses tout en préservant les cellules saines. Ces travaux, à lire dans la revue «Nature», participeront à améliorer l’efficacité de ces traitements.

En dépit du millier de lésions qui endommagent notre ADN chaque jour, le génome de nos cellules est particulièrement stable grâce à un système de réparation très efficace. Parmi les gènes codant pour les protéines de réparation figurent BRCA1 et BRCA2 (pour BReast CAncer 1 et 2, ou cancer du sein 1 et 2), qui interviennent notamment lors des cassures de la double hélice d’ADN. La présence de mutations dans ces gènes (chez environ 2 femmes sur 1000) peut aboutir à la non-réparation de l’ADN lésé et augmente très fortement le risque de développer un cancer du sein ou de l’ovaire (ou de la prostate chez l’homme).

Des victimes collatérales

Depuis environ 15 ans, des inhibiteurs de PARP sont utilisés pour traiter ce type de cancers. Ces traitements bloquent les activités et piègent la protéine PARP sur l’ADN. Il n’y a alors plus de signal d’alarme pour déclencher la réparation de l’ADN. Ce traitement s’avère toxique pour les cellules à croissance rapide, telles que les cellules cancéreuses, qui génèrent trop de mutations sans avoir le temps de les réparer, et sont ainsi vouées à mourir. Mais notre organisme abrite aussi des cellules saines à croissance rapide. C’est le cas par exemple des cellules hématopoïétiques (à l’origine des globules rouges et blancs) qui, en victimes collatérales, sont également détruites massivement lors de traitements anti-PARP.

Les mécanismes par lesquels les anti-PARP tuent les cellules (cancéreuses ou non) sont encore mal compris. Le laboratoire de Thanos Halazonetis, professeur ordinaire au Département de biologie moléculaire et cellulaire de la Faculté des sciences de l’UNIGE, en collaboration avec FoRx Therapeutics, a disséqué les mécanismes d’action des inhibiteurs de PARP.

Les scientifiques ont utilisé deux classes d’inhibiteurs de PARP qui bloquent de façon identique la synthèse de la chaîne de sucres qui sert de signal d’alarme, mais qui ne piègent pas PARP sur l’ADN avec la même intensité. L’équipe a observé que ces deux inhibiteurs tuent avec la même efficacité les cellules cancéreuses, mais que l’inhibiteur qui lie PARP faiblement à l’ADN est beaucoup moins toxique pour les cellules saines.

Inhiber l'activité sans piéger PARP à l'ADN

«Nous avons découvert que PARP n’agit pas seulement comme un signal d’alarme pour recruter les protéines réparatrices de l’ADN. Il intervient également lorsque des structures anormales de l’ADN se forment à la suite de collisions entre différentes «machineries» qui lisent ou copient la même portion d’ADN», explique Michalis Petropoulos, post-doctorant au Département de biologie moléculaire et premier auteur de l’étude. Lors de l’utilisation d’un traitement anti-PARP, ce signal d’alerte pour prévenir les collisions n’est pas déclenché. Ces collisions entre les «machineries» entraînent une augmentation des lésions de l’ADN, qui ne peuvent pas être réparées dans les cellules cancéreuses, car elles sont dépourvues des protéines de réparation BRCA.

La deuxième activité des traitements anti-PARP, qui se traduit par le piégeage des PARP sur l’ADN, entraîne également des lésions de l’ADN qui doivent être réparées par les cellules. Mais cette réparation n’est pas assurée par les protéines de réparation BRCA et, par conséquent, les cellules normales et cancéreuses sont tuées. «Nous avons donc découvert que l’inhibition de l’activité enzymatique suffit à tuer les cellules cancéreuses, tandis que le piégeage (lorsque PARP est lié fortement à l’ADN) tue également les cellules normales et s’avère donc responsable de la toxicité de ces médicaments», résume Thanos Halazonetis, qui a dirigé l’étude.

«Ces connaissances permettront de développer des inhibiteurs de PARP plus sûrs qui inhibent l’activité enzymatique de PARP sans la piéger sur l’ADN».

(Comm/M.P.)

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