Les critiques d'Hugues Dayez

Les critiques d'Hugues Dayez avec "Tout le monde debout", Franck Dubosc crée la surprise

Tout le monde debout

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Par Hugues Dayez

Soyons francs : de Franck Dubosc, on n’attendait pas grand-chose. Mais l’acteur volontiers cabotin de "Camping", "Disco" et autres "Boule et Bill", en choisissant de passer derrière la caméra pour mettre en scène un scénario de son cru dans "Tout le monde debout", opère une salutaire révolution dans sa carrière.

Tout le monde debout

A priori pourtant, rien de neuf sous le soleil dans "Tout le monde debout" : Dubosc y incarne son éternel personnage de dragueur invétéré, qui multiplie les mensonges et les conquêtes d’un soir… Mais le film ne tarde pas à prendre une autre tournure. Ce personnage, Jocelyn, perd sa mère sans avoir eu le temps de se réconcilier avec elle. Pour faire son deuil, il s’occupe de vider l’appartement de cette dernière, et s’assied distraitement sur son fauteuil roulant. C’est alors que survient la voisine, Julie, une charmante auxiliaire de vie, qui le prend pour un infirme. Jocelyn, séduit par la jeune femme, se garde bien de la détromper. Il se fait bientôt inviter dans la famille de Julie, et est présenté à sa grande sœur Florence qui, elle, est une vraie hémiplégique. Entre la vraie et le faux handicapé, une tendre complicité ne tarde pas à se nouer… Mais Jocelyn sait que cette complicité est basée sur un mensonge, et ne sait pas trop comment faire ses aveux sans risquer de tout perdre.

Les surprises sont nombreuses dans "Tout le monde debout". Dubosc scénariste ne s’est pas réservé le beau rôle et, au contraire, se révèle très généreux : son Jocelyn est assez piteux, tandis que le rôle de Florence offre un très joli personnage féminin pour Alexandra Lamy. Il a aussi soigné les seconds rôles : la secrétaire et le meilleur ami de Jocelyn sont campés par Elsa Zylberstein et Gérard Darmon au meilleur de leur forme. Mais ce qui séduit définitivement dans "Tout le monde debout", c’est la qualité de l’écriture : un mélange réussi d’humour et d’émotion, et le regard que porte Dubosc sur le monde du handicap n’est jamais gnangnan ni caricatural. Comme Gérard Jugnot in illo tempore avait réussi à surprendre avec son film "Une époque formidable", Franck Dubosc, contre toute attente, a réussi son passage derrière la caméra.

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Hannah

Hannah, belle femme vieillissante, travaille comme femme de ménage dans une grande villa de la périphérie bruxelloise… On devine qu’elle a connu des jours meilleurs, et s’apprête à vivre une épreuve : son mari va purger une longue peine de prison. Quel crime a-t-il commis ? Le film ne le précise pas, mais on comprend qu’il a mis le couple au ban de la société. Hannah, désormais seule dans son appartement, doit réapprendre à vivre.

Hannah, imaginée par le réalisateur italien Andrea Pallaoro, a valu à Charlotte Rampling le prix d’interprétation féminine à la Mostra de Venise. C’est parfaitement mérité : sans elle, le film s’écroule. Car "Hannah" est un film avare de dialogues et d’explications, et repose sur le visage de l’actrice, qui est censé exprimer toutes les émotions du personnage. Et Rampling, ses admirateurs le savent, a ce charisme, cette présence absolument magnétiques. Grâce à elle, le spectateur s’intéresse à Hannah, qui déambule dans un Bruxelles presque méconnaissable.

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La part sauvage

Ben, condamné pour des petits braquages, sort de prison après trois ans. Pendant ce séjour derrière les barreaux, il s’est converti à l’Islam. Grâce à un copain, il trouve une place de mécanicien dans un garage de Molenbeek. Ben cherche à renouer avec son fils de dix ans mais son ex-femme se méfie de lui. Maladroitement, Ben peine à retrouver une place dans la société, et est tenté par les discours du gourou local, un Islamiste qui prépare le Jihad…

Le premier long-métrage de Guérin Van der Vorst a des qualités : une interprétation très juste de Vincent Rottiers (hélas, trop souvent cantonné à ce genre de rôles) et une mise en scène fluide et réaliste. Il a aussi des défauts, à chercher plutôt du côté du scénario, qui enchaîne des séquences assez prévisibles. Comme si, de par son thème choisi, le film était forcé de suivre une sorte de Jeu de l’Oie du jeune en phase de radicalisation. Bien sûr, "La part sauvage" a le mérite d’être un film ancré dans l’actualité, mais si l’on choisit la fiction et non le documentaire, il faut savoir nourrir cette fiction d’une part de romanesque. Ce qui fait cruellement défaut à ce drame sincère, certes, mais un peu trop linéaire.

Every Day

Rihannon, adolescente romantique, est toute étonnée lorsque son petit copain Justin se montre, un beau jour, tendre et attentionné envers elle… Le lendemain, elle doit déchanter : Justin est redevenu le gros balourd qu’il a toujours été. En réalité, Justin n’était pas lui-même, il était habité par un esprit – dénommé "A" - qui vit un cruel destin : il est condamné à "emprunter" tous les jours le corps d’un quidam différent pour survivre. Rihannon, une fois la stupeur passée, va développer un dialogue de plus en plus intime avec A… Mais comment nouer une relation véritable avec un esprit qui change continuellement de physionomie ?

Attention, un film peut en cacher un autre : derrière la comédie hollywoodienne pour teenagers, "Every Day" aborde des vraies questions existentielles via son postulat fantastique. Et à une époque où la dictature du "look" fait rage, oser distiller le bon vieux message de Saint-Exupéry dans "Le Petit Prince" - "L’essentiel est invisible pour les yeux, on ne voit bien qu’avec le cœur "– a quelque chose d’infiniment réjouissant… Bien sûr, "Every Day" reste un produit hollywoodien de consommation courante, mais les inventions de son scénario méritent qu’on s’y attarde.

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