BioNTech prévoit de lancer un premier traitement anticancer en 2026

Publié le 23 Mar 2024 à 16H00 Modifié le 23 mars 2024
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À l’occasion de la publication de ses résultats annuels, la société BioNTech a annoncé qu’elle prévoyait de lancer un premier traitement contre le cancer en 2026. Elle vise également dix approbations d’indications d’ici 2030.

BioNTech est un laboratoire de biotechnologie spécialisé dans le développement d’immunothérapies actives, basé à Mayence, en Allemagne. La société s’est notamment illustrée dans la mise au point, en partenariat avec Pfizer, d’un vaccin à ARN messager contre la COVID-19. À l’occasion de la publication de ses résultats annuels, elle a annoncé qu’elle prévoyait de lancer un premier traitement contre le cancer en 2026. Elle vise également dix approbations d’indications d’ici 2030.

BioNTech développe des traitements à base d’ARN messager (ARNm). Ces traitements constituent la base de vaccins ou de thérapies de remplacement de protéines dans le cas de maladies rares. Ils servent également à l’immunothérapie individualisée contre le cancer. On parle ici d’immunothérapies « actives », car leur rôle est de susciter ou d’amplifier la réponse immunitaire du patient.

En 2020, le vaccin anti-Covid de BioNTech – développé en partenariat avec Pfizer – fut le premier vaccin à ARNm approuvé pour une utilisation contre la COVID-19. L’an dernier, la société a lancé une série d’essais cliniques au Royaume-Uni pour des immunothérapies ciblant plusieurs types de cancer. Elle espère obtenir des autorisations pour dix de ses traitements d’ici 2030. Un premier traitement pourrait apparaître sur le marché dès 2026.

Aider le système immunitaire à lutter contre le cancer

En 2023, BioNTech et Pfizer ont livré plus de 400 millions de doses de vaccin contre la COVID-19 dans le monde. Le dernier en date est le vaccin formulé spécifiquement pour lutter contre le variant Omicron XBB.1.5 (commercialisé sous le nom de Comirnaty®). À savoir que la souche XBB du virus de la Covid-19 est actuellement prédominante en Europe.

Les deux laboratoires travaillent également sur un programme de vaccins combinés à base d’ARNm contre la COVID-19 et la grippe. Les données de l’essai de phase 1/2 ont démontré des réponses immunitaires robustes aux souches de grippe A, de grippe B et de SARS-CoV-2. Ils ont donc lancé un essai clinique de phase 3 en décembre 2023.

Les bénéfices tirés du vaccin anti-Covid ont permis à BioNTech d’investir massivement dans la recherche contre le cancer, sa spécialité initiale. « En oncologie, nous avons renforcé nos compétences clés en concluant plusieurs partenariats et avons réalisé de nombreuses avancées cliniques. Aujourd’hui, notre pipeline en oncologie englobe plusieurs candidats en stade intermédiaire et avancé de développement clinique, notamment des ADC [ndlr : antibody-drug conjugate] expérimentaux, des vaccins à ARNm et des immunothérapies innovantes », explique le professeur Uğur Sahin, PDG et cofondateur de BioNTech.

Les thérapies de BioNTech visent non pas à cibler directement les cellules tumorales, mais à stimuler le système immunitaire du patient pour l’aider à combattre la maladie. « S’attaquer aux causes profondes de l’échec du traitement du cancer, telles que l’hétérogénéité du cancer et la variabilité interindividuelle, est au cœur de notre stratégie », précise le communiqué de l’entreprise.

Plusieurs produits d’immunothérapie à l’étude

Les vaccins à ARNm ont beaucoup fait parler d’eux pendant la pandémie. Le principe est d’amener les cellules cibles à produire une protéine spécifique, identique à un antigène d’agent pathogène ou à un antigène tumoral. Ceci se fait via la traduction de l’ARNm contenu dans le vaccin. Ensuite, le système immunitaire de l’hôte va détecter la protéine et, en réponse, va produire des anticorps ciblant l’agent pathogène ou la tumeur.

Les conjugués anticorps-médicament (en anglais antibody-drug conjugates ou ADC) sont peut-être moins connus du grand public. Il s’agit d’une classe de médicaments conçus pour cibler et éliminer les cellules tumorales tout en épargnant les cellules saines. Ils se composent d’un médicament cytotoxique (anticancéreux), couplé à un anticorps ciblant un antigène tumoral spécifique (ou une protéine) qui se trouve uniquement dans ou sur les cellules cancéreuses.

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Structure schématique d’un conjugué anticorps-médicament (ADC). Crédits : Bioconjugator – CC BY-SA 4.0

BioNTech travaille actuellement sur le développement de deux ADC. L’un est conçu pour cibler le facteur de croissance épidermique humain 2 (HER2). Cette protéine intervient dans le cancer du sein. Les tumeurs caractérisées par la surexpression d’HER2 sont plus agressives et répondent moins bien à la chimiothérapie et à l’hormonothérapie. Les premières données de l’essai de phase 1/2 en cours sont encourageantes.

Le second vise à cibler l’antigène 2 de la surface des cellules trophoblastiques (TROP2). Ce dernier joue un rôle dans la progression tumorale en interagissant avec plusieurs voies de signalisation moléculaire clés associées au développement du cancer. Plusieurs cancers solides (cancer colorectal, rénal, du poumon et du sein) ont été associés à une surexpression de TROP2. Ces deux ADC sont développés en collaboration avec l’entreprise chinoise DualityBio.

Plusieurs autres produits d’immunothérapie sont en cours de développement, notamment un anticorps monoclonal visant à lutter contre les formes métastatiques du cancer du poumon non à petites cellules – la forme la plus courante de cancer du poumon. La société travaille également sur plusieurs anticorps bispécifiques, qui facilitent l’interaction entre les cellules immunitaires et les cellules tumorales.

Bientôt un vaccin pour traiter les cancers du poumon et du pancréas ?

BioNTech a également évoqué deux vaccins anticancéreux. Le premier vaccin candidat, BNT116, est un vaccin à ARNm codant pour six antigènes associés au cancer du poumon. Il est actuellement en cours d’évaluation pour le traitement du cancer du poumon non à petites cellules au stade avancé.

Le vaccin candidat BNT122 est, quant à lui, destiné à traité l’adénocarcinome canalaire pancréatique. Ce cancer du pancréas affiche une incidence croissante et un faible taux de survie. Il s’agit d’un vaccin personnalisé, à base de néo-antigènes à ARNm, formulé à partir de tumeurs réséquées chirurgicalement. Il est conçu pour stimuler les cellules T et ainsi garantir une survie plus longue sans récidive. À noter que ces vaccins n’ont pas d’action préventive comme un vaccin classique, mais sont conçus pour traiter la maladie lorsqu’elle se déclare.

En résumé, le pipeline d’oncologie de BioNTech contient actuellement 10 essais de phase 2 et 3 en cours. La société prévoit de continuer à développer son pipeline tout au long de l’année, en vue de son premier lancement prévu en 2026. Pour atteindre ses objectifs, elle s’est entourée de plusieurs partenaires (DualityBio, MediLink Therapeutics, OncoC4, Biotheus). Elle a également noué un partenariat stratégique avec le gouvernement britannique pour permettre à ses immunothérapies personnalisées d’atteindre jusqu’à 10 000 patients d’ici 2030.

Il existe de très nombreux types de cancers, à différents stades d’avancement. La maladie peut évoluer différemment chez chaque patient et tous ne répondent pas de façon identique aux traitements existants. Selon de récentes estimations, on attend plus de 35 millions de nouveaux cas de cancer en 2050. Les thérapies personnalisées de BioNTech pourraient contribuer à améliorer les options de traitement pour les patients actuels et futurs du monde entier.

À propos de l’auteur
Fleur Brosseau
Fleur Brosseau
Scientifique de formation et animée par l'envie d'apprendre sans cesse de nouvelles choses, j'explore des sujets très variés, de l'actu médicale à l'astrophysique, en passant par l'intelligence artificielle et l'archéologie. Mes thèmes favoris : la santé, la psychologie, l'astronomie et l'environnement.
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