Des projecteurs ont pris le relais du soleil à la nuit tombée. Ni Emmanuel Macron ni Luiz Inacio Lula da Silva, dit « Lula », n’ont lésiné sur la mise en scène, un tantinet lunaire en pleine jungle : le chef de l’Etat, qui venait d’atterrir en provenance de Cayenne, et son hôte brésilien, venu l’accueillir à Belem, capitale de l’Etat du Para, dans le nord du Brésil. Les deux présidents se sont retrouvés, mardi 26 mars, sur l’île de Combu, située face à la ville, en présence du cacique indigène Raoni Metuktire, qui a été fait pour l’occasion chevalier de la Légion d’honneur. « Je considère Lula comme mon frère, Macron comme mon fils », a lancé le nonagénaire. Aux premières heures de cette visite d’Etat au Brésil, les deux dirigeants n’en demandaient pas tant et en ont profité pour afficher, à défaut d’être d’accord sur les guerres en Ukraine et à Gaza, un front commun sur les questions climatiques.
Après un tête-à-tête, le premier du voyage, Emmanuel Macron et Lula ont lancé un appel commun pour faire de la lutte contre le réchauffement de la planète une « priorité stratégique ». Le président français apporte ainsi son soutien à son homologue, dans la perspective de la COP30, que le Brésil compte justement organiser à Belem en 2025. Pour René Poccard, expert du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement en Amazonie, les deux dirigeants « ont un intérêt partagé pour se placer aux avant-postes du combat contre la déforestation et lutter pour les droits des peuples autochtones, afin de protéger l’Amazonie mais aussi envoyer un signal à leur électorat respectif ».
Pour Emmanuel Macron, il s’agit au passage de ne pas reproduire les faux pas commis par le passé, à l’heure où il entend approfondir les liens avec le Brésil pour peser face aux pays du Sud global. En août 2019, le président français avait échangé une passe d’armes brutale avec le prédécesseur de Lula, Jair Bolsonaro (extrême droite), au sujet des incendies en Amazonie. Il avait alors appelé à une mobilisation internationale depuis le G7 de Biarritz, en l’absence de tout représentant du Brésil. Cette attitude avait choqué sur tout l’éventail politique, jusqu’à la gauche, sourcilleuse sur le thème de la souveraineté brésilienne en Amazonie.
« Lula n’a pas tenu les promesses qu’il m’a faites »
Si le bilan environnemental d’Emmanuel Macron est contesté en France, Lula se considère en position de force dans ce domaine. Au total, 5 152 kilomètres carrés de forêt ont été détruits dans l’Amazonie brésilienne en 2023, année de son retour au pouvoir, soit une chute spectaculaire de 50 % par rapport à 2022. Après le mandat de Jair Bolsonaro, marqué par le saccage de la forêt tropicale, Lula s’est fixé pour objectif une « déforestation zéro » à l’horizon 2030. « Il lutte avec nous mais doit composer avec le Congrès et les élus proches de Bolsonaro, qui représentent l’agrobusiness », nuance Watatakalu Yawalapiti, cheffe indigène venue assister à la cérémonie de décoration de Raoni.
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