La maman de Sidonie est mécontente : « mon amie aurait quand même pu dire merci », se plaint-elle. Sidonie ne comprend pas bien pourquoi sa mère est si énervée… Les enfants ont souvent l’impression qu’on les « oblige » à dire merci pour les embêter. Qui n’a pas été le témoin gêné d’un parent essayant désespérément de faire dire « merci » à son enfant ?

Cependant aujourd’hui les psychologues s’accordent pour admettre que dire merci est plus qu’un geste conventionnel. En effet, dire merci induit que l’on reconnaît l’autre avec ses désirs. L’enfant apprend ainsi à dépasser son « moi tout-puissant » et à se mettre à la place de l’autre. C’est donc une étape essentielle dans la construction de sa personnalité !

Alors, à un enfant qui nous demande pourquoi on doit dire merci, on peut lui demander d’imaginer par exemple qu’il est à la place de celui qui lui a prêté son jouet. Et que ressent-il ? Il n’avait peut-être pas envie de prêter son jouet mais pourtant il l’a fait. Et si l’autre ne reconnaît pas son geste, il ressent comme un regret, un petit pincement au cœur, une vraie frustration. L’enfant peut donc tout à fait comprendre que, a contrario, si l’autre lui dit merci avec un grand sourire, il se sentira « reconnu » dans sa gentillesse, et « le sacrifice » lui semblera bien plus léger.

Selon le philosophe André Comte-Sponville, « il y a dans la gratitude une main tendue vers l’autre en retour de son aide ». Ce merci donne envie d’aller plus loin dans l’amitié car une complicité s’installe. Quelque chose de plus important se joue entre celui qui remercie du fond du cœur et celui qui reçoit ce merci !

Quand ils sont plus grands, on peut aussi expliquer aux enfants combien la politesse est « utile » socialement. Par exemple en imaginant avec eux combien la vie serait terriblement dure, si chacun faisait ce dont il a envie, au moment où il en a envie, sans tenir compte des autres ! Cela créerait une insécurité, comme un vent de panique. C’est aussi une façon de leur démontrer que si l’on est attentif aux autres, eux-mêmes le seront vis-à-vis de nous.

Dans l’éducation, il n’existe pas de recette miracle, mais il est sûr que dire merci s’apprend d’abord en famille. N’hésitez pas à montrer l’exemple et même à forcer le trait avec les tout-petits : « Tu es drôlement gentil de prêter ton camion préféré… »

Savoir dire merci, éprouver de la reconnaissance à l’égard de la générosité de la vie, n’est-ce pas aussi la meilleure approche pour leurs premiers pas dans la prière ? Ainsi on peut les inviter dès leur plus jeune âge à dire merci à Dieu pour les bienfaits qu’ils ressentent : pour ces regards d’amitié, ces sourires, le geste tendre d’un parent, les bons moments passés en famille, en vacances, et toute cette vie qui frémit en eux, à chaque minute…