Article modifié à 10h50 avec rajout des précisions du ministère des Armées
Il y a les discours aux sommets de l'OTAN, du G7 et du conseil européen qui encouragent la hausse des budgets de défense. Et puis il y a les actes de la France en complet décalage. Alors que le monde a décidé de se réarmer depuis le début de la guerre en Ukraine, le gouvernement Castex a décidé ni plus, ni moins de réduire de 300 millions d'euros le budget des Armées, dont 202 millions d'euros du budget d'acquisition d'équipements militaires (programme 146), selon le projet de décret du gouvernement dont La Tribune a eu connaissance. Un très mauvais signal. Pour autant, le ministère des Armées assure à La Tribune que cette réduction n'est que "temporaire" et que ces crédits budgétaires déjà gelés seront "récupérés" lors de la prochaine loi de finances rectificative prévue en juillet. Il s'agirait d'une "avance budgétaire".
Cette réduction reste certes symbolique (sur un budget de 40,9 milliards d'euros en 2022) mais elle intervient au moment où les armées françaises doivent se préparer de façon urgente à un conflit de haute intensité pour lequel elles sont loin d'être prêtes notamment en matière de stocks de munitions. Le ministère des Anciens combattants est également ponctionné à hauteur d'environ 51 millions d'euros, dont 5 millions concernant les indemnisations des victimes de persécutions antisémites et d'actes de barbarie pendant la Seconde Guerre Mondiale.
5,85 milliards de crédits annulés dans le budget 2022
Pourquoi une telle coupe ? Le gouvernement doit faire des économies pour financer le nouveau plan de résilience économique et sociale. Le décret portant ouverture de 5,85 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP) sur le budget général de l'État, est destiné à financer les dépenses urgentes liées à la guerre en Ukraine, dans le cadre de ce nouveau plan mis en place face à la hausse des prix de l'énergie et des carburants, et à assurer l'accueil de populations réfugiées fuyant la guerre en Ukraine (300 millions). Ce décret d'avance permet la mise à disposition en urgence des crédits nécessaires à ces dépenses.
Ce nouveau plan de résilience est financé essentiellement par des annulations de crédits budgétaires destinés au plan d'urgence face à la crise sanitaire (3,47 milliards d'euros) et par la contribution de tous les ministères (1,98 milliard d'euros), dont celle du ministère des Armées la plus importante. Le ministère de l'Enseignement supérieur et de la recherche perd quant à lui 234,7 millions d'euros, dont 16 millions pour la recherche spatiale. "Les annulations de crédits proposées portent intégralement sur des crédits mis en réserve et ont été réparties homothétiquement sur tous les budgets ministériels, hors programmes déjà en tension dans le contexte actuel", selon le projet de décret, dont La Tribune a eu connaissance.
Toutes ces annulations vont permettre de financer les nouvelles dépenses décidées par le gouvernement, notamment le financement des dépenses relatives à la hausse des prix des carburants pour les particuliers et les professionnels (2,99 milliards d'euros). Cette ouverture de crédits est nécessaire pour financer la mise en œuvre d'une remise sur le prix des carburants de 15 centimes hors taxe par litre entre le 1er avril et le 31 juillet 2022, pour tous les ménages et les entreprises sur le territoire métropolitain et dans les Outre-mer. L'État doit également financer une aide exceptionnelle aux entreprises pour compenser les pertes liées à l'énergie (1,5 milliard d'euros).
Un soutien ciblé à des filières fortement impactées
Enfin, ces annulations permettront de financer le soutien exceptionnel de l'État à des secteurs touchés de plein fouet par la hausse du carburant et des céréales. C'est le cas des pêcheurs qui vont recevoir 30 millions d'euros, soit le remboursement de 35 centimes par litre de carburant entre le 17 mars et le 31 juillet 2022 et une prise en charge des cotisations sociales patronales. C'est également le cas pour le secteur agricole avec 550 millions d'euros, qui vont compenser l'augmentation du coût de l'alimentation animale dans les élevages pendant quatre mois (400 millions) et la prise en charge des cotisations sociales patronales (150 millions).
C'est aussi le cas pour le secteur routier (transporteurs routiers et autocaristes), qui va recevoir un soutien financier de 400 millions d'euros. Enfin, le secteur des travaux publics va bénéficier d'une aide de 80 millions dédiée aux entreprises affectées par la volatilité du prix de l'énergie.
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