Théâtre : Nicole Garcia, jamais sans la scène

La comédienne retrouve le théâtre avec « Royan », dirigée par son fils aîné dans un rôle écrit pour elle par Marie NDiaye.
Nicole Garcia sur la scène du théâtre de la Ville
Nicole Garcia sur la scène du théâtre de la Ville (Crédits : © LTD / Jean-Louis Fernandez)

Son charme, sa beauté, ce vaporeux mystère qui lui sont consubstantiels enchantent depuis toujours. Avec ses cheveux blonds et ses pommettes larges et hautes, on l'imaginerait slave. D'ailleurs, elle fut une Elena inoubliable dans Oncle Vania d'Anton Tchekhov et une merveilleuse Arkadina dans La Mouette. Sa voix, cette manière unique qu'elle a d'insuffler un air léger à ses paroles, comme un chant très particulier, très séduisant, n'a jamais changé.

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Mais l'enfermer dans une image serait réduire la personnalité complexe et profonde de Nicole Garcia. Comédienne, cinéaste originale et fertile avec neuf films singuliers, elle revient ces temps-ci au théâtre. « En réalité je ne m'en éloigne jamais longtemps, dit celle qui reçut, à 20 ans, un premier prix au Conservatoire national supérieur d'art dramatique. J'en ai besoin. Je retrouve le théâtre comme un monde familier et aimé. J'y suis moins responsable que lorsque j'écris ou coécris un scénario et tourne un film, mais j'y suis tout autant saisie d'une crainte, d'un sentiment de ne pas trouver exactement ce que veulent et l'auteur et le metteur en scène. »

Nicole Garcia

Nicole Garcia sur la scène du théâtre de la Ville (© LTD / Jean-Louis Fernandez)

Avec Royan, sous-titré La professeure de français, Nicole Garcia est en terrain de connaissance. C'est Frédéric Bélier-Garcia, son fils aîné, qui la dirige sur un texte de Marie NDiaye, autrice que le metteur en scène connaît bien pour avoir monté sa première pièce, Hilda, dès 2002, puis Honneur à notre élue. C'est pour Nicole Garcia que Marie NDiaye a composé Royan. « Elle n'a retenu que quelques traits, observe la comédienne. Oran, où je suis née et ai vécu jusqu'en 1962, l'exil jamais facile, les cheveux blonds... La professeure n'est pas calquée sur moi. Mais, évidemment, ces détails sont profondément ancrés en moi, même après tant d'années. »

Et lorsque Marie NDiaye décrit : « La vraie jeune fille / celle qui arrivait d'Oran découvrait la France / allait par les rues dans un état de stupeur d'effarement et d'anxiété / aussi le corps ravagé de mélancolie et se sentant en tout point inférieure à chacun », on voit Gabrielle, la professeure, mais on imagine aussi la toute jeune fille qui deviendra la radieuse et brillante artiste.

« Je ne m'éloigne jamais longtemps du théâtre. J'en ai besoin. Je le retrouve comme un lieu familier et aimé » (Nicole Garcia)

L'argument de Royan est saisissant. « Il y a quelque chose d'un thriller dans la manière dont Marie NDiaye lance le monologue, souligne l'interprète. Une femme pénètre dans un hall, un cartable à la main. Elle regarde dans la boîte aux lettres. Elle rentre chez elle. Et soudain, elle sent quelque chose, une présence. » Les parents de Daniella, une adolescente qui s'est défenestrée un mois auparavant, veulent savoir, tenter de comprendre. Ils sont devant la porte de l'appartement de Gabrielle. Elle les devine et s'adresse à eux.

Magnifique partition, interprétation tout en nuances, de véhémence à souffrance et interrogations venues de très loin. Frédéric Bélier-Garcia dirige avec délicatesse cette actrice au jeu moiré. Compromis par le confinement, le spectacle avait été en partie filmé et diffusé par le site du Théâtre de la Ville. Depuis, il a tourné, et notamment jusqu'au Festival d'Avignon. Heureuse de ces retrouvailles, heureuse de voir ses deux fils, Frédéric Bélier-Garcia et Pierre Rochefort, tracer leur voie dans le monde de l'art, Nicole Garcia est au travail sur son prochain film. Il pourrait être tourné en 2025. « Pas encore de titre définitif, pas de scénario encore assez avancé pour que je puisse en parler précisément, dit-elle. Mais j'aime particulièrement ce moment de l'écriture, au plus près des personnages. » Cinéma encore avec le film qu'elle a tourné avec Christophe Honoré : Marcello mio réunit Chiara Mastroianni, Catherine Deneuve, en une fantaisie autour de la mémoire du grand comédien italien. Un film pour Cannes ? Pour le reste : « Je lis, je vais au cinéma, je fréquente des galeries et je marche. J'adore marcher dans Paris. »

Théâtre de Paris, dix représentations exceptionnelles, du 17 au 28 avril. Du mercredi au samedi à 20 heures, le dimanche à 17 heures. Durée : 1 h 20. Tél. : 01 86 47 72 49.

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