Les souvenirs de la musique congolaise : biographie et œuvres de Tabu Ley Rochereau (2)

Vendredi 12 Avril 2024 - 9:41

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A la faveur de la politique du recours à l’authenticité décrétée par l’ancien président de la République démocratique du Congo (RDC), Mobutu, en octobre 1971, Tabu ajoute Ley au patronyme de son père pour devenir Tabu Ley. Son passage à l’Olympia à Paris en 1970 est la consécration d’une carrière débutée sous la houlette de son mentor, Kabasele dit Grand Kallé.

De 1963 à 1966, Rochereau produit dans l’African Fiesta en compagnie de Nico, Decheau, Roger Izéïdi et Mulamba Joseph alias Mujos, Depuissant, Mwenee et Willy Mbembe des titres sublimes qui bousculent l’écosystème musical du Pool Malebo, entre autres, ‘’Fiesta kombo ya sika’’, ‘’Amicale Lipopo’’, ‘’Seis Linda Cubana’’, ‘’To kéyi ko yékola’’, ‘’Mabusele’’, ‘’Ya Gaby’’, ‘’Rendez-vous chez là-bas’’, ‘’Permission’’. Oeuvres dans lesquelles le duo Rochereau et Mujos est mis sur orbite et ponctuées par les balades rythmiques de la guitare de Kasanda Nicolas dit Nico. ‘’Mokolo na ko kufa’’, un autre titre de Rochereau qui connut également un succès immense en 1966, fut une autre étape de son parcours musical dans l’African Fiesta National.

Suite à la défection de Mujos qui traversa le fleuve en 1964 pour rejoindre les Bantous de la capitale, Jean Kwamy Munsi, célèbre chanteur, star de la rumba congolaise (transfuge de l’Ok Jazz) vient combler le vide laissé par Mujos et forme un tandem époustouflant avec Rochereau dans les chansons ‘’Belinda chérie na ngai ya dimanche’’, ‘’Suke’’ et autres… Signalons que l’arrivée de Jean Kwamy Munsi dans l’African Fiesta fut un événement grandiose dont sa sortie officielle eut lieu au bar Vis-à-vis à Matongue, avec comme annonce ‘’Kwamy a bandi lelo’’ (Le début de Kwamy dans l’African Fiesta). Dès l’entame de la chanson ‘’Belinda chérie na ngai ya dimanche’’ de Kwamy, celle-ci fut accompagnée par des applaudissements nourris du public venu nombreux assister à son premier concert. C’était l’apothéose au regard de l’ambiance qui entourait cet événement. L’African Fiesta était au summum de sa gloire qui connaîtra sa fin le 13 décembre 1965, suite à l’implosion du groupe due au conflit de leadership opposant Nico et Rochereau. Ce dernier va créer avec Roger Izéïdi l’African Fiesta 66 ou Afrcan Fiesta national tandis que Nico et son frère Décheau montent l’African Fiesta Sukisa avec Mizele Paul, Dionga Apôtre et autres…

En 1968, Pierre Mulele (un des promoteurs de la rébellion en RDC) est exécuté. Un événement malheureux qui coïncide avec la chanson de Rochereau intitulée ‘’Kashamankaoy’’ dont la rumeur insinue qu’il s’agit d’une attaque en règle contre Mobutu. S’en suivra le titre ‘’Moto a kokana Nzambé a ko sukissa’’ (l’homme propose, Dieu dispose). Conséquence, ses relations avec le pouvoir de Mobutu se détériorent.

En 1969, Rochereau recrute des danseurs (Pascal et Dilins) et un groupe de danseuses appelées ‘’Les Roherettes’’ composé de Marietou, Angélique, Annie et Saïdi qu’il emmène à Paris, l’année suivante, pour agrémenter deux concerts à l’Olympia. La tournée est écourtée à la suite de la découverte d’une affaire financière qui met en cause la gestion du groupe.

Au plan artistique, Rochereau, très inspiré par la musique pop et le rythm and Blues (un vent venu des Etats-Unis et qui gagna l’Afrique dans les années 1960 et 1970), est le premier artiste musicien de la rive gauche du fleuve Congo qui introduit la batterie dans le répertoire de l’Afrisa et dont Seskain Molenga est le premier batteur. Il inaugure ce genre dans le groupe qui se produit à l’Olympia. Les titres comme ‘’Sélija’’, ‘’Silikani’’, ‘’Mundi’’ et ‘’Samba’’ avec la fameuse danse ‘’Sum djoum’’ en sont une parfaite illustration. Il sied de noter que parmi les orchestres qui embrassent ce style, l’on peut citer les Bella Bella des frères Soki, Les grands Maquisards et l’orchestre Continental de Josky Kiambukuta  et Wuta Mayi, Serpent, Bopole Masianmina qui adoptent le Sum djoum dans leur répertoire.

L’amour de Rochereau pour la pop musique et le rythm and Blues s’est manifesté dans la chanson ''Lal Abi'' qui n’est autre qu’une interprétation dans une langue du Congo de la célèbre chanson ''Des Beatlers'' (groupe anglais), ‘’Let it be’’ et lors de ces différentes prestations sur scène où l’on voit Rochereau porter des pantalons pattes d’éléphant et coiffure Afro. A suivre…

Auguste Ken Nkenkela

Légendes et crédits photo : 

Tabu Ley Rochereau/DR

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