L’Artothèque de Troyes, fermée au public : c’est là, dans un bâtiment appartenant à la Ville, que sont pour le moment conservées 120 000 créations artistiques réalisées par des enfants et des jeunes de 3 à 25 ans, dans le cadre d’un concours international. Chaque année, un jury spécialisé sélectionne 300 candidats originaires de 150 pays et, parmi eux, 100 lauréats, dont les travaux font ensuite l’objet d’expositions en France et ailleurs.
Derrière ce patrimoine vivant se cache un homme, Michel Girost, cadre exemplaire et amateur d’art déterminé à inscrire la jeunesse dans l’histoire de l’humanité : « Ce que j’ai voulu cultiver par dessous tout, avant même la valeur esthétique, c’est la mémoire. » Nous l’avons rencontré, une matinée pluvieuse, au milieu de ses trésors.
Tout a commencé à la fin des années 1960. Michel Girost, trentenaire en poste à la Direction départementale de l’équipement, rend visite à ses parents, comme tous les samedis, à Anglure, dans sa Marne natale. Il se souvient d’après-midis autrefois passés à sculpter le bois ou le métal tantôt avec son père, artisan ébéniste, tantôt avec l’un de ses instituteurs favoris. « C’étaient deux hommes d’une grande générosité et d’un profond humanisme qui m’ont ouvert sur le monde et les autres. »
Ce jour-là, il retrouve l’enseignant retraité qui lui apprend que les œuvres dont il était si fier ont disparu. « Son successeur n’avait gardé aucune de mes productions. Cette nouvelle m’a bouleversé. » Le jeune cadre se met alors en tête de visiter tous les musées alentour, pour constater avec stupeur que la jeunesse ne s’y trouve absolument pas représentée. « C’est la période la plus riche et la plus féconde de notre existence, où nous traversons toutes sortes de métamorphoses, et il n’en reste rien. D’où mon désir d’apporter une réponse à ce problème. »
En 1982, Michel Girost rejoint l’Institut mondial d’art de la jeunesse (IMAJ), association dont il prend les rênes trois plus tard et redéfinit progressivement les enjeux. Son but ? Transformer cette structure estampillée « Cercle UNESCO » en « Centre pour l’UNESCO », un label garant d’une plus grande visibilité. Pour ce faire, il fallait remplir les cases suivantes : disposer d’un siège administratif ouvert au public, recruter un personnel qualifié pour accueillir ce public, lancer un centre de documentation propre à l’organisation internationale, prévoir des échanges entre les jeunes, mener une activité à l’échelle mondiale.
De ce dernier critère est née l’idée de rajeunir et d’internationaliser un concours artistique initialement conçu pour les adultes du département. Cette transformation s’est opérée en l’espace de trois ans, entre 1990 et 1993, grâce au soutien de quelques membres du conseil d’administration, qui apportaient un coup de main ponctuel à Michel Girost, puis à une poignée de stagiaires complices dans la rédaction – manuscrite à l’époque – de longs courriers administratifs. Aujourd’hui, une soixantaine de bénévoles contribuent au rayonnement de l’association.
Cette évolution résulte d’une méthode bien précise. « J’ai appliqué le management par objectif, que j’ai appris dans le cadre de ma profession. En 1990, j’ai rédigé une brochure de quarante pages détaillant un « projet ultime » à accomplir en sept cycles de cinq ans. Nous sommes à la fin du dernier et le musée pour la jeunesse dont j’ai toujours rêvé s’apprête à voir le jour… »
Où ? Dans le domaine de la congrégation Notre-Dame de Bon Secours, qui abritera la collection de l’actuelle Artothèque, une académie de pratique artistique, un service de documentation numérisée, un « fonds de recueil » destiné aux productions menacées de disparition (l’association parisienne Germaine Tortel, qui porte le nom d’une illustre inspectrice des maternelles, vient de confier 2 000 pièces à l’équipe Michel Girost), des espaces de résidence réservé aux moins de 30 ans… Tout un programme !
Artothèque - Institut Mondial d'Art de la Jeunesse - IMAJ
1 Rue Linard Gonthier • 10000 Troyes
www.centre-unesco-troyes.org
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