Bétonisation des sols : ces 424 projets qui échapperont à l’objectif zéro artificialisation nette

Alors que la loi Climat et Résilience a lancé en 2021 le pari d’une « zéro artificialisation nette des sols » d’ici 2050, le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu a envoyé un message « de souplesse » mercredi dans Les Échos.

La loi ZAN vise à atteindre en 2050, la zéro artificialisation nette, c'est-dire ne plus goudronner de nouveaux espaces à moins de « renaturer » des surfaces équivalentes (Illustration). LP/Arnaud Dumontier
La loi ZAN vise à atteindre en 2050, la zéro artificialisation nette, c'est-dire ne plus goudronner de nouveaux espaces à moins de « renaturer » des surfaces équivalentes (Illustration). LP/Arnaud Dumontier

    Projet d’autoroute A69 entre Castres et Toulouse, extension de l’aéroport de Nantes, agrandissement du port de Dunkerque, liaison ferroviaire entre Lyon et Turin. Tous ces dossiers souvent dénoncés par les écologistes font partie des 424 projets considérés « d’envergure nationale et européenne présentant un intérêt général » qui échapperont au dispositif de zéro artificialisation nette (ZAN) visant à limiter la bétonisation des sols, et dont la liste a été dévoilée par le ministère de la Transition écologique cette semaine.

    La loi Climat et Résilience de 2021 vise à réduire de moitié la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers entre 2021 et 2031 par rapport à la décennie précédente, avant d’atteindre en 2050 l’objectif de zéro artificialisation nette, c’est-à-dire ne plus du tout goudronner le pays, à moins de « renaturer » des surfaces équivalentes. Lorsque la loi ZAN qui précise le dispositif a été adoptée en juillet 2023, le gouvernement avait déjà prévu d’exclure du texte les projets « d’envergure nationale et européenne présentant un intérêt général majeur ».

    Tous les projets industriels retenus

    Parmi les 424 projets retenus, 167 sont immédiatement éligibles et leur calendrier est « relativement certain ». Ils se feront sans être soumis à cette loi. La moitié sont des infrastructures routières ou ferroviaires et 30 % de nouvelles usines. Les 257 restants doivent encore être confirmés. Tous les projets industriels présentés ont été retenus, a précisé le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, dans un entretien aux Échos.

    Où en sont les objectifs fixés par la loi Climat et Résilience sur l’artificialisation des sols ? « Si finalement on ne réduit pas les surfaces artificialisées de 50 % sur la décennie, mais de 47 % ou 48 %, et bien, j’assume », livre Christophe Béchu aux Échos.

    Pour Me Arnaud Gossement, avocat spécialiste du droit de l’environnement, « pour sauver le dispositif, le ministre envoie un message de souplesse ». Car la ZAN est « impopulaire » auprès des élus locaux. Certains « estiment que leur commune ne devrait pas être traitée comme les autres. Qu’eux ont fait des efforts pour limiter le béton et qu’ils sont logés à la même enseigne que ceux qui n’ont pas fait d’efforts. »

    En septembre 2023, le président de la région Auvergne - Rhône-Alpes Laurent Wauquiez (LR) avait d’ailleurs annoncé se retirer du dispositif, se sentant empêché par « le pouvoir central », avant de se rétracter en février 2024.

    Un objectif non contraignant

    Mais pour Arnaud Gossement, « la loi de juillet 2023 a été votée de manière que cet objectif ne soit vraiment qu’un objectif et, donc, qu’il ne soit pas contraignant. Il n’y a pas de sanctions si cet objectif n’est pas réalisé. » Pourtant, limiter la bétonisation reste « fondamental si on veut lutter contre le réchauffement climatique ». « C’est un objectif indispensable, ne serait-ce que pour préserver nos surfaces agricoles », insiste l’avocat.

    Selon l’Office français de la biodiversité, les conséquences de l’artificialisation des sols sont multiples : augmentation du risque d’inondation, accélération du réchauffement climatique, réduction du potentiel agronomique des sols. Le ministre a d’ailleurs rappelé mercredi que « l’artificialisation est la première cause de perte de biodiversité, elle prend sur des espaces vierges qui sont eux-mêmes des puits de carbone, elle crée des îlots de chaleur alors qu’on veut justement les éliminer et elle provoque du ruissellement favorisant les inondations ».