Chez les Pinault, les aînés s’appellent François. Le patriarche, marchand de bois aux Champs-Géraux dans les Côtes-d’Armor, puis son fils, François, fondateur de l’empire de la distribution et du luxe. A sa suite, François-Henri lui a succédé et dirige depuis 2003 la société familiale Artémis et sa principale filiale, le groupe de luxe Kering.
A 61 ans, ce dernier songe-t-il désormais à passer le flambeau à un nouveau François ? Toujours est-il qu’il vient d’introniser son aîné, François Louis Nicolas, 26 ans, comme administrateur de Christie’s. Il occupera le fauteuil de son grand-père, François Pinault, 87 ans, qui avait acheté la célèbre société de ventes aux enchères londonienne en 1998.
Ainsi se développe une dynastie familiale comme les aiment les grandes sociétés de luxe, LVMH, Hermès, Chanel, Prada… Dans la réalité, hormis le cas Hermès, le cap de la troisième génération n’a pas été franchi, compte tenu de la jeunesse de ces entreprises. Les multinationales du luxe sont des animaux trop jeunes pour avoir connu l’épreuve du temps long.
Des propriétés toujours plus luxueuses
Mais, en dépit de leur puissance actuelle, qui fait d’elles les stars du CAC 40, elles conservent une gestion très patrimoniale, diversifiant leurs actifs dans tout ce qui peut accroître leur standing ou leur influence : mode, vins précieux, hôtellerie, commerce, art, médias… et bien sûr immobilier.
Le groupe Kering vient ainsi de réaliser la plus grosse opération de ces dernières années en Europe en achetant, pour 1,3 milliard d’euros, un splendide bâtiment du XVIIIe siècle au 8, via Monte Napoleone, à Milan. Avec 12 000 mètres carrés dont 5 000 de magasins, le groupe sera au large pour déployer les collections d’Yves Saint Laurent et de Gucci. L’immeuble abrite même la célèbre pâtisserie Cova, propriété de son meilleur ennemi, LVMH.
Que ce soit sur les Champs-Elysées de Paris, sur la Ve Avenue de New York ou via Monte Napoleone, ces deux-là se cherchent sans cesse, déversant des milliards dans des propriétés toujours plus luxueuses. Selon le Financial Times, Kering, qui génère 4,5 milliards d’euros de trésorerie chaque année, aurait dépensé 10 milliards d’euros en deux ans pour s’offrir des murs, mais aussi des maisons de parfums ou des créateurs de lunettes de soleil.
Une distraction de plus, grincent les analystes, qui voient fondre les résultats de Gucci, principal moteur de la richesse du groupe. Mais ils savent aussi l’obsession dynastique d’empires éphémères dont bien peu franchiront le cap des trois générations.