Métropole de Montpellier. Acte II : le budget acte la fracture avec les écologistes

Le conseil de métropole de Montpellier de ce mardi 2 avril devait répondre à plusieurs questions politiques. Une partie des écologistes de l'exécutif en ont apporté une.

La présentation du budget a donné lieu à un long débat.
La présentation du budget a donné lieu à un long débat. (©CN / Métropolitain)
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Parmi les 90 affaires, entre le vote du budget 2024 et les interrogations de plusieurs élus écologistes dont la vice-présidente Coralie Mantion ou l’avenir de l’usine Ametyst avec l’option d’une filière CSR ayant causé le départ du porteur de la stratégie Zéro déchet François Vasquez, le conseil de métropole de Montpellier de ce mardi 2 avril devait répondre à plusieurs questions politiques. Une partie des écologistes de l’exécutif en ont apporté une.

Un budget « responsable »

Premier point important à l’ordre du jour, la présentation du budget 2024 dans « une année cruciale où nous réaliserons le plus d’investissements dans la métropole notamment en matière de mobilités avec 80% des rails de la ligne 5 posées » a souligné Renaud Calvat non sans rappeler « des contraintes nationales complexes ». Un budget de 2Md€ dont 1,2Md€ de dépenses affectées aux politiques publiques avec 458M€ dédiés aux mobilités et 130M€ pour la gestion des déchets. Sur ce dernier point, le délégué aux finances précise : « C’est une somme jamais atteinte » et que la collectivité y consacrait 88M€ en 2019 soit une augmentation de 48%.

Les dépenses et recettes de fonctionnement s’équilibrent à 808M€ tout comme les dépenses et recettes d’investissement à 1,2Md€. L’épargne brute s’élève à 78M€, le taux d’épargne à 11% et la capacité de désendettement de la Métropole est désormais à 12 ans et 9 mois. « Vu la situation et l’année charnière 2024 de l’investissement, c’est extrêmement rassurant et encourageant. C’est responsable » affirme le délégué aux finances. Le conseil n’étant pas composé en groupes déclarés contrairement à un conseil municipal, chaque élu pouvait prendre la parole.

Début du tunnel montpelliérain

Une présentation qui n’a pas convaincu les premiers intervenants. Salim Jawarhi, qui remplace Mohed Altrad, démontre, en s’interrogeant sur le bilan de l’agence de développement économique, que l’augmentation des recettes du versement mobilité qui finance la gratuité est due à « la dynamique du territoire avant 2020 ». Abdi El Kandoussi lâcha un « merci ». Alenka Doulain dénonça « la métropolisation à outrance » au détriment « de la qualité de vie dans nos communes » en estimant « que la majorité n’a rien compris à la planification environnementale » et, face au contexte, juge « vous ne vous adaptez pas, vous renoncez ». Elle pointe des dettes inutiles avec notamment la gratuité des transports en commun qu’elle qualifie de « plus grand coup de com de France ».

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Serge Guiseppin, président de la commission des finances, regrette « le dogmatisme » de l’exécutif en constatant que le débat d’orientation budgétaire n’a pas apporté de modification au budget. Face aux perspectives locales et nationales, il craint « un avenir économique beaucoup plus sombre que prévu » et s’inquiète de la dette dépassant les douze ans. « L’esprit keynésien c’est bien mais il doit s’accompagner d’une réduction drastique des frais de fonctionnement » plaide-t-il.

François Vasquez à la charge

Pour sa première saillie verbale, François Vasquez fustigea les moyens dont il disposa pour mettre en place sa stratégie Zéro déchet et ne manqua pas de charger René Revol, coupable, après avoir vanté la Régie Publique de l’eau, « de prôner une DSP qui donne les clés aux privés et aux multinationales ». Sur le budget accordé à son ancienne délégation, il estime : « Nous sommes très loin des enjeux et on prétend avoir des résultats sans mettre la politique en place. Y-a-t’il quelqu’un de mieux placer que moi pour le juger ? Vingt ans que je travaille dessus et quatre ans que je suis en charge ». Un ton hautain qui amusa une partie de la salle mais pas de quoi déstabiliser l’orateur. « Les finances de la Métropole virent au rouge et la décision sur les CSR sur le plan budgétaire va obérer toutes nos autres politiques. Comment peut-on être aveugle et sourd face à cela ? Le fiasco du choix industriel précédent d’Ametyst nous plonge dans les difficultés actuelles. Qui a compris le fiasco d’Ametyst ? » interrogea-t-il.

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Revenant au budget, Manu Reynaud s’est attaché à affirmer l’utilité des écologistes au sein de l’exécutif en argumentant que « l’apaisement voulu depuis 2020 qui dans cette assemblée permet de discuter entre les uns et les autres, les maires, les conseillers dont la moitié est issue des rangs du conseil municipal de Montpellier. Nous sommes persuadés que nous n’avons jamais raison tout seul et seul contre les autres » et d’affirmer que « les élus écologistes voteront pour ce budget ». Bien vu…

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Autre écologiste montpelliéraine, Célia Serrano poursuivit sur la même tonalité que François Vasquez. « Nous ne sommes pas à la hauteur des enjeux, ce n’est pas sérieux » en dénonçant comme lui le manque de moyens financiers et d’appeler à plus de prévention pour faire baisser les tonnages de déchet : « Il est temps de se changer de paradigme et de passer à l’écologie ».

Coralie Mantion acte la fracture

Pour les communistes, Hervé Martin a souligné « l’enjeu de porter le fer sur la question du logement avec 43M€ d’investissement puisque le gouvernement a décidé de se désengager alors que les besoins sont énormes » et de même pour « la politique de la ville qui va aussi subir des coupes de la part du gouvernement donc ce sera aussi pour nous une nécessité que de porter la bataille très fort ». Il a également demandé, pointant que « le libéralisme est souvent le meilleur ami de l’écologie punitive », à ce que « pour chaque mesure écologique on mesure l’impact social » en prenant pour exemple l’application de la ZFE avec l’interdiction au 1er janvier 2015 des véhicules Crit’Air 3. À la suite, Clothilde Ollier a souhaité connaître le coût global de la candidature de Montpellier capitale Européenne de la culture 2028.

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Après avoir annoncé ses intentions, la prise de parole de la vice-présidente, déléguée à l’urbanisme, Coralie Mantion était attendue. «Notre engagement pour le territoire était de réaliser la transition écologique, de le rendre plus vert et plus résilient. Il y a urgence à tenir ses engagements. Cela veut dire y mettre les moyens humains et financiers » tonne l’écologiste qui assène : « Le constat est là après quatre ans de mandat, le modèle ne change pas. Il est plus important que la SA3M fasse des bénéfices plutôt que de lutter contre le déclin de la biodiversité, que de tendre vers la souveraineté alimentaire ou de préserver nos ressources en eau. Le budget ne permet pas de tourner la page de l’urbanisme de la bétonisation, nous ne préparons pas assez notre territoire au dérèglement du choc climatique ». Et, elle, d’affirmer le vote contre des écologistes actant ainsi leur fracture avec l’exécutif.

René Revol assume l’endettement

Plus de 2h après le début du conseil, René Revol souligna d’emblée : « Je suis le premier non Montpelliérain à prendre la parole ». Ce par quoi compléta son homologue de Beaulieu Arnaud Moynier : « Et le premier maire ! ». L’agacement d’une part de l’hémicycle commençait à se faire sentir. « Nous avons mis en place un exécutif où tous les maires sont présents et nous arrivons à organiser des débats collectifs. Cette démarche de gouvernance partagée est à maintenir quelque soit nos divergences avec la possibilité d’en débattre et d’en décider ensemble » souligna le maire de Grabels.

Revenant au débat, René Revol appuie : « Nous faisons un choix dans le budget, si nous renoncions aux investissements pour faire baisser notre ratio d’endettement, nous contribuerions à faire une politique procyclique comme le fait le gouvernement. Il est donc fondamental de maintenir notre investissement. Bien sûr, il faut faire des choix qu’il faut poser sur la table et discuter collectivement ». Pour autant, sans être dans un optimisme totale, il prévient : « Regardez les finances des 119 collectivités de plus de 100 000 habitants. Nous sommes dans la moyenne mais, même si certaines ont un ratio d’endettement supérieur à nous, à 12 ans et 9 mois nous sommes dans la difficulté. Nous allons devoir faire des choix mais nous allons assumer ».

L’ancienne mandature se fait entendre

Retour à Montpellier avec Stéphanie Janin, qui en charge de l’urbanisme lors de la précédente mandature avait présenté en 2019 un Plan Climat, interrogea : « Que se passe-t-il autour du PLUI ? Allez-vous le valider durant le mandat ? Pourquoi un tel retard ? ». Comme il l’avait fait au conseil municipal, son camarade Abdi El Kandoussi fustigea « une gestion catastrophique » en évoquant  « une mise sous tutelle » et « une hausse des impôts ». Il prévient : « Messieurs les maires, si vous voulez l’éviter il va falloir mettre la main à la poche, l’effort sera énorme » et, contestant les orientations budgétaires d’une manière que n’aurait pas renié l’ancien délégué aux finances Max Lévita, de prédire d’ici la fin du mandat « une capacité de désendettement de dix-huit ans » en jugeant ainsi que : « Votre décollage est chaotique, nous sommes dans un scénario catastrophique d’atterrissage pour les habitants de la métropole ».

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Troisième voix de l’ancienne majorité, Bernard Travier a alerté quant à la situation financière de l’opéra de Montpellier, dont il a démissionné du conseil d’administration, estimant que « aucune mesure n’était prise pour y remédier ». Annonçant un déficit prévisionnel de 5,4M€ fin 2024, il demande à renégocier les 3M€ versés pour la location du Corum. L’ancien délégué à la culture a également témoigné son inquiétude quant à l’avenir du spectacle vivant suite aux coupes annoncées par le gouvernement, à la survie des festivals face aux baisses de subvention de la Métropole et de par ailleurs questionner la fusion du Centre Chorégraphique National et Montpellier Danse. Réaffirmant ses doutes quant à la candidature à la capitale européenne et faisant références aux récentes émeutes urbaines, il a ainsi invité à « réfléchir à une nouvelle politique culturelle et donner une place beaucoup plus importante à la culture notamment dans l’enseignement ».

Les maires commencent à s’agacer

Saluant la politique des mobilités, le maire de Cournonterral William Ars a souligné l’importance de mettre en place une ligne de transport collectif en adéquation avec la création du futur lycée, en ajoutant : « Avec d’autres communes, nous constituons la vitrine ouest de la Métropole, il faut que cette vitrine soit attractive notamment en matière de mobilités ».

Dans un échange au ton grave et cordial, Jean-Luc Meissonnier s’est lui directement adressé à Coralie Mantion devançant son vote et ses conséquences. « Ta démarche est tout à fait légitime, peut-être politique, mais en votant contre le budget, en tant que vice-présidente, la noblesse aurait été que tu viennes dans l’hémicycle et que tu ne sièges plus à la présidence ». Mettant en avant la construction du PLUI, le maire de Baillargues tonne : « Nous sommes pas mal de maires ici, nous ne sommes pas là pour subir la politique montpelliéraine ». Le maire de Saint-Brès Laurent Jaoul ajoute de la théâtralité à la séquence en invitant Coralie Mantion à s’assoir entre lui et Yvon Pellet dans l’hémicycle. « Il y a d’autres affaires notamment sur la bouvine où on vous expliquera ce qu’il faut faire. Mais, par loyauté, vous devriez quitter la tribune » invita-t-il.

Le budget adopté mais…

Peut-être face à l’ambiance qui s’était installé, Fanny Dombre-Coste a tenu à « saluer les maires. Il y a 31 communes représentées et c’est par le consensus que se définissent les politiques publiques » et d’envoyer un message en saluant les vice-présidents ayant effectué les présentations budgétaires de leur délégation. « Il n’y a pas d’expert dans cet hémicycle. Il y a des hommes et des femmes élus ». En défendant les investissements, « en soutien à notre économie et permettre la réalisation de nos projets dans le cadre des politiques publiques », la socialiste envoie un autre message en pointant la hausse des coûts dus à la non réalisation de la ligne 5 en 2017 : « Certains élus de cette hémicycle devraient être plus humbles dans leurs propos ».

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En conclusion des interventions, prenant sa casquette de maire de Jacou, Renaud Calvat est revenu sur la tonalité des échanges. « C’est un budget établi par l’ensemble des maires et des vice-présidents. Nous sommes un établissement de coopération intercommunale, nous sommes la force de 31 maires et conseils municipaux. Effectivement, il peut se jouer d’autres choses dans cet hémicycle. mais nous, les 31 maires, sommes tous les jours au service de nos concitoyens, les élections, cela viendra après ». Un recadrage que le président de la séance pimenta d’un commentaire. « Que des oppositions s’opposent, après tout c’est la règle, elles pourraient s’opposer de façon constructive, elles ne le font pas ». Une vraie invitation à la coopération…

Avec trois abstentions et quatorze votes contre, le budget 2024 a été adopté sous les applaudissements de Renaud Calvat, faiblement accompagné. Parmi les écologistes, Manu Reynaud, Bruno Paternot, Marie Massart et Radia Tikouk sont restés fidèles à l’exécutif. De par son vote contre, Coralie Mantion s’est en exclue et a ainsi indirectement acté sa sortie de la majorité municipale.

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