C'est une première depuis le lancement de la monnaie unique. Le conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne (BCE) a décidé, jeudi 8 avril, de réduire de 0,5 point son principal taux directeur (taux de refinancement, Refi), qui passe ainsi de 3 % à 2,5 %. Cette mesure a été adoptée « à une très large majorité », a expliqué Wim Duisenberg, le président de la BCE. Bien que quelques voix discordantes se soient fait entendre, aucun vote formel n'a eu lieu au sein d'un conseil composé des onze présidents des banques centrales de la zone euro et des six membres du directoire de la BCE.
Attendue par une partie des marchés financiers, cette baisse a surpris par son ampleur. A la veille de la réunion, nombre d'économistes envisageaient plutôt une réduction de 0,25 point. Ce mouvement, a précisé M. Duisenberg, cherche à désamorcer toute anticipation d'une prochaine baisse : « Nous voulions faire un geste aussi convaincant que possible parce que nous craignions qu'une baisse moins large ne soit interprétée comme la première étape d'un cycle de baisses des taux », a-t-il précisé. En outre, la BCE a modifié le corridor de taux d'intérêt encadrant la mise à disposition de liquidités aux banques : le taux de la facilité de dépôt passe de 2 % à 1,5 %, alors que le taux de la facilité de prêt descend à 3,5 %, contre 4,5 %.
CONJONCTURE PRÉOCCUPANTE
La principale explication de cette « surprise » est à chercher du côté d'une conjoncture européenne préoccupante. La décision « contribue à créer un environnement économique dans lequel le potentiel de croissance considérable de la zone euro pourrait être exploité », a observé le président de la BCE, relevant que « les prévisions de croissance s'étaient aggravées partout » lors d'un quatrième trimestre 1998. « La faiblesse est particulièrement apparente dans le secteur manufacturier, où la confiance s'est détériorée davantage encore » ; la création d'emplois a en outre connu « une certaine décélération », a constaté M. Duisenberg, qui n'a pas évoqué, à l'inverse des ses précédentes interventions, le bon niveau de confiance des consommateurs. Ce sombre tableau, confirmé par la Commission européenne, qui vient de revoir à la baisse ses perspectives de progression du produit intérieur brut des onze de l'euro en 1999 (à 2,2 %, contre 2,6 %, à l'automne), contraste d'autant plus avec « la forte croissance » des Etats-Unis.
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