Une vidéo de représailles
Pour rappel, Alain Soral, de son vrai nom Alain Bonnet, était jugé pour ses propos à l’encontre d’une journaliste de Tamedia. Après un article peu à son goût, datant de 2021, il avait publié une vidéo sur internet où il taxait l’auteure de «grosse lesbienne» et «militante queer», insinuant que ce dernier terme voulait dire «désaxé», publiant même une photo de l’intéressée.
Après le jugement de deuxième instance, l’essayiste de 65 ans, qui s’est installé à Lausanne en 2019, a fait recours contre sa condamnation. Il demandait notamment à être acquitté de l’accusation de discrimination et incitation à la haine au sens de l’article 261 bis du Code pénal, une disposition étendue depuis juillet 2020 aux discriminations fondées sur l’orientation sexuelle.
«Rabaissant, déshumanisant et outrancier»
En substance, le recourant contestait s’en être pris à un groupe protégé par cet article 261 bis, soutenant que le terme queer se rapporte à l’identité de genre et non à l’orientation sexuelle et que ses propos n’étaient pas méprisants. Le TF balaie ces deux arguments.
Le langage utilisé est «rabaissant», «déshumanisant» et «outrancier», relève la Haute Cour. Il invite l’internaute à mépriser la journaliste, en raison notamment de son orientation sexuelle. Pour le TF, il ne fait «aucun doute que le message tend à éveiller et exciter un sentiment de haine». Et comme l’a retenu la Cour cantonale, le pamphlétaire a agi intentionnellement, de sorte que tous les éléments constitutifs de l’article 261 bis sont réunis.
Le recourant ne peut, en outre, se prévaloir de la liberté journalistique ni de la protection accordée au débat politique. Il ne se prévaut d’aucun engagement auprès d’un organe de presse et n’exerce pas de mandat politique, énumère l’arrêt du TF.
Peine moins lourde
Alain Soral obtient toutefois partiellement gain de cause concernant la durée de la peine. Les 30 jours-amende infligés en première instance pour diffamation étant entrés en force, faute de recours sur ce point, la Cour cantonale ne pouvait pas le condamner à 60 jours de peine de prison ferme, dont 20 jours pour diffamation.
En définitive, Alain Soral écope de 30 jours-amende à 50 francs pour diffamation ainsi que d’une peine privative de liberté de 40 jours pour discrimination et incitation à la haine. Pour le TF, le choix d’une peine de prison, au lieu de jours-amende, n’est pas critiquable, vu les antécédents du recourant, condamné à 22 reprises en France, et son insensibilité à la sanction pénale. (Arrêt 6B_1323/2023 du 11.3.2024).