Cet article est issu du magazine Les Indispensables de Sciences et Avenir n°216 daté avril/ juin 2024.
Goutte froide : le cauchemar des prévisionnistes
En circulant autour de la Terre, il arrive que le courant-jet polaire se déforme et qu'une poche d'air très froid (entre -20 et -36 °C) s'en détache. Située aux alentours de 5000 mètres d'altitude et baptisée "goutte froide" par les météorologues, elle peut descendre vers des latitudes plus basses, jusqu'à entrer en contact avec des masses d'air plus chaud. Des nuages comme les cumulus et cumulonimbus se forment alors.
Il en résulte un temps perturbé : averses, grésil ou grêle, neige et vents parfois forts. La goutte froide peut durer plusieurs jours. Elle se déplace lentement et d'une manière difficile à prédire par les modèles météorologiques. Le phénomène peut aussi se produire en été : en juillet 2021, de très fortes précipitations ont causé d'importantes inondations notamment en Belgique et dans l'ouest de l'Allemagne.
Poche d'air froid et de basse pression, la goutte froide crée de fortes perturbations. Crédit : Philippe Puiseux
Vortex polaire : un génie du froid venu de la stratosphère
En hiver, au niveau des pôles, une zone d'air froid se forme à environ 30 kilomètres d'altitude. C'est le vortex polaire. Il est maintenu par la circulation d'un courant de très haute altitude, le jet stratosphérique de la nuit polaire. Ce dernier est situé au-dessus du courant-jet polaire et tourne dans le même sens. La température du vortex polaire augmente en été, et il se fragmente, avant de se reformer dès l'automne.
Cependant, il peut arriver, même en hiver, que la température de la stratosphère remonte brutalement sous l'effet de mouvements de l'atmosphère à très grande échelle. Elle peut ainsi passer de -80°C à -20°C en quelques jours : c'est ce que les météorologues appellent le "réchauffement stratosphérique soudain". C'est alors que le sens de rotation du jet stratosphérique de la nuit polaire peut s'inverser et perturber le courant-jet. Celui-ci capte alors de l'air très froid qui est déversé sur l'Europe, comme cela s'est produit en France en février 2012.
Crédit : Philippe Puiseux
Et avec le réchauffement ?
Dans son rapport publié en 2021, le Giec indique que "différents aspects de la circulation atmosphérique ont probablement changé depuis le milieu du siècle" et note par exemple que les deux cellules de Hadley ont tendance à s'étendre en direction des pôles. L'attribution de ce changement aux activités humaines ou à une variabilité naturelle du climat n'est pas évidente. Une telle extension pourrait provoquer des sécheresses dans les régions concernées (bassin méditerranéen, sud de l'Afrique, Amérique du Sud, notamment.
Cellules de convection : mouvements d'air en circuit fermé
Les températures entre l'équateur et les pôles tentent constamment de se rééquilibrer par des mouvements d'air. À l'échelle du globe se forment donc de grands mouvements circulatoires. Ils se divisent en grandes cellules de convection : des zones de l'atmosphère dans lesquelles l'air s'élève et descend en circuit fermé, tour à tour se réchauffant et se refroidissant. Il existe trois cellules de convection pour chaque hémisphère.
La cellule polaire, aux hautes latitudes, est provoquée par une descente vers la surface terrestre d'air froid et sec, qui se réchauffe et remonte ensuite dans l'atmosphère autour de 50 ° de latitude. La cellule de Hadley se caractérise par la remontée en altitude de l'air chaud et humide de l'équateur. L'humidité est libérée par les précipitations, puis l'air asséché redescend vers les régions désertiques du globe. La cellule de Ferrel est la résultante des cellules polaire et de Hadley et tourne en sens inverse de celles-ci. Elle provoque notamment des vents d'ouest sur l'Europe. Les courants-jets se forment et circulent à la convergence des cellules de convection.
Crédit : Philippe Puiseux
Question d'équilibres
À l'échelle de notre planète, de grands mouvements d'air, les courants-jets ou jet streams, situés aux confins de la troposphère et de la tropopause, déterminent le climat et la météo : c'est la circulation atmosphérique, qui permet - avec la circulation océanique - d'équilibrer la distribution d'énergie autour du globe. Ces grandes masses d'air résultent de la rotation de la Terre et des différences d'exposition au Soleil, donc de température, entre les pôles et l'équateur. Les courants-jets polaires et subtropicaux parcourent la Terre d'ouest en est.