"Je regrette de ne pas avoir réussi à me faire comprendre dans l’émission du 1er juin et d’avoir blessé par mes propos. Mon intention était à l’opposé."C'est ce que déclare Christine Angot dans un communiqué de presse transmis à des rédactions le 4 juin, quelques jours après la polémique concernant ses propos tenus sur l'esclavage dans l'émission d'On n'est pas couché diffusée samedi 1er juin. 

Parmi les invités ce soir-là, Franz-Olivier Giesbert, venu défendre son nouveau roman, Le Schmock (Gallimard), et Ginette Kolinka, rescapée du camp d'extermination d'Auschwitz. Face à eux, les deux chroniqueurs de l'émission : Christine Angot et Charles de Consigny.

L'ouvrage de Franz-Olivier Giesbert relate une histoire d'amour dans l'Allemagne nazie. À cette occasion, Christine Angot décide de dénoncer une "concurrence des mémoires" : "Tout ça c’est pareil, tout le monde a souffert et les souffrances sont toutes à égalité. À force de vouloir indifférencier les souffrances des uns et des autres, ça conduit à l’indifférence en fait, de ce qu’a vécu un groupe de personne ou une personne en particulier."

Des esclaves "en pleine forme"

Christine Angot aurait pu arrêter son argument ici. Mais en voulant montrer qu'on ne peut comparer les souffrances liées à l'esclavage, et celles liées à la Shoah, elle a donné une vision très réductrice de la première.

“Le but avec les Juifs pendant la guerre, ça a bien été de les exterminer, de les tuer, et ça introduit une différence fondamentale, alors qu’on veut confondre avec par exemple l’esclavage et l’esclavage des Noirs envoyés aux États-Unis ou ailleurs, et où c’était exactement le contraire, commence Christine Angot. C’est-à-dire l’idée c’était qu’ils soient en pleine forme [“Qu’ils soient en bonne santé, oui”, l'interrompt Franz-Olivier Giesbert], en bonne santé pour pouvoir les vendre et pour qu’ils soient commercialisables. Donc non, ce n’est pas vrai que les traumatismes sont les mêmes, que les souffrances infligées aux peuples sont les mêmes”.

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Des propos "absurdes"

"J’ai voulu rapprocher les deux crimes contre l’humanité que sont l’esclavage et la Shoah, tout en prenant soin de de spécifier la différence fondamentale de méthode dans la déshumanisation, d’un côté exterminer les personnes, de l’autre leur retirer leur humanité pour en faire des objets de commerce qu’on achète et qu’on vend", défend Christine Angot dans le communiqué de presse transmis aux rédactions.

L’expression « en bonne santé » était cependant absurde. Je suis bien consciente que de nombreux esclaves ont été tués et que le propriétaire exerçait sur eux un droit de vie et de mort.

La chroniqueuse, qui ne sera plus à l'antenne de On n'est pas couché à la rentrée, est aussi revenue sur ce qui a le plus choqué : dire que les esclaves étaient maintenus "en bonne santé". "L’expression « en bonne santé » était cependant absurde. Je suis bien consciente que de nombreux esclaves ont été tués et que le propriétaire exerçait sur eux un droit de vie et de mort. Indifférencier les souffrances infligées par ces crimes me paraît dangereux. L’indifférenciation pouvant conduire à l’indifférence."

La romancière termine son communiqué par d'autres regrets : "Je n’ai pas su trouver les mots. Je le regrette. Mon travail est de me faire comprendre. Je m’excuse d’y avoir échoué."

900 signalements au CSA

Sur le plateau, personne n'avait réagi aux propos tenus par Christine Angot. Il n'en a pas été de même du côté des téléspectateurs : 900 signalements ont été déposés auprès du Conseil supérieur de l'audiovisuel, qui a même été saisi par la ministre des Outre-mer, Annick Girardin.

Sur Twitter, les réactions outrées étaient tombées très rapidement. Parmi les critiques, de nombreux Twittos lui ont reproché de minimiser l'horreur que l'esclavagisme a fait subir à des hommes, femmes et enfants. 

Même Aymeric Caron, ancien chroniqueur de l'émission, s'était indigné sur Twitter. "Ignorance ? Maladresse ? Stupidité ? Une honte en tout cas", avait écrit le journaliste et essayiste.