Économie

Hébergement des pèlerins : au Puy-en-Velay, la grande marche en avant d'Airbnb

Hébergement des pèlerins : au Puy-en-Velay, la grande marche en avant d'Airbnb
En moyenne, une nuitée au Puy-en-Velay coûte 79 euros (photo d'illustration). © Renaud Baldassin
La proposition de logements locatifs au Puy-en-Velay a explosé ces dix dernières années. Rien qu’en 2023, le nombre d’annonces actives a bondi de 44 %. Le site spécialisé Airbnb profite de cette demande en accueillant pèlerins et touristes, le tout moyennant des coûts très variables.

«Ne vous livrez pas à l’amour de l’argent », dit la Bible. « Bienvenue à la maison, ça fera 40 euros. » De nos jours, inutile de venir frapper aux portes des églises pour demander l’asile. Dormir, ça se paye. Et les entreprises spécialisées le savent bien. En tête de liste, Airbnb, le géant américain qui met les hôtes en relation aux quatre coins du globe, n’a pas épargné Le Puy-en-Velay de son influence.

Fini l’esprit bivouac. Chaque année, entre octobre et avril, ils arrivent en voiture, en train, en bus... chargés de valises qu’ils traînent sur les pavés. Les touristes affluent par milliers pour prendre le chemin de Saint-Jacques notamment. Ils viennent profiter de la ville, admirer les édifices religieux, prendre du bon temps, rester quelques jours.

Tous sites confondus, on dénombre 266 annonces actives au Puy, soit une hausse de 46 % par rapport à l’année dernière selon le site spécialisé AirDNA. Ces logements sont réservés la moitié du temps, soit 29 % d’occupation supplémentaire sur une année glissante. Airbnb prend 88 % des parts du marché à lui tout seul. Le glouton 2.0 rafle les premières places des résultats de recherche sur Google, Ecosia, Mozilla. Gargantua est incontournable. Difficile de trouver des logements sans passer par la société californienne. Au Puy, Airbnb est devenu un résident à part entière. Si au mois de janvier, c’est le calme plat, les chiffres culminent en août, période d’affluence des Jacquets.

Trouver chaussure à son pied

Les visiteurs veulent trouver le bon plan : vite, et si possible pas cher. La capitale des chemins s’est transformée en usine locative. En moyenne, une nuitée au Puy-en-Velay coûte 79 euros. Une semaine parmi les Ponots, c’est 474 euros. Et les prix peuvent grimper davantage, jusqu’à 2.500 euros pour sept jours sur place. De la simple chambre chez l’habitant à 16 euros, les voyageurs peuvent dépenser 419 euros par nuit. Les revenus générés par ces logements express ont augmenté de 28 % en moyenne, soit 11.000 euros par an et par annonce. Pour trouver la perle rare, il vaut mieux s’y prendre à l’avance, et bien décortiquer le site. Tout dépend de la case « Ce que propose ce logement ». La grande majorité est équipée d’une cuisine, avec chauffage et machine à laver. D’autres services, moins « essentiels », se sont glissés dans les annonces. On trouve une piscine dans 2 % des offres et même des jacuzzis dans 4 % des cas. De quoi permettre aux 25.000 marcheurs annuels qui passent par Le Puy de trouver chaussure à leur pied.

Lit king size, climatisation, baignoire, les Airbnb proposent ce que les pèlerins ne trouveraient pas dans les gîtes traditionnels qui ponctuent leur itinéraire. À la veille d’un long voyage de 780 km, ils s’offrent quelques heures de confort. Reste à prendre garde au « forfait ménage », qui peut s’ajouter à la facture. Situés entre 15 et 60 euros en fonction de la surface, ces frais supplémentaires s’ajoutent au tarif. Le profil détendu et pressé à la fois du jacquet fait généralement qu’il s’en acquitte sans broncher.

Ubérisation du Bed & Breakfast

Aujourd’hui, on n’arrive plus à la tombée de la nuit pour aller toquer aux portes mais on réserve des semaines à l’avance. On ne partage pas un café avec les propriétaires en arrivant, on récupère les clés dans une boîte après avoir reçu le code par SMS. On ne casse plus la croûte avec ses hôtes, on préfère une kitchenette avec extracteur de jus et Thermomix... Airbnb profite allègrement du point de départ du GR65 pour en faire son juteux business. Comme UberEats qui livre des plats à domicile, ou encore la colonie de chauffeurs VTC. Même là où sonnent les cloches, Internet impose ses standards. Pourtant, on trouve encore certains pèlerins qui préfèrent des modes d’hébergement plus spontanés, loin des sites de réservation, de type Donativo. Là où la participation aux frais d’hébergement et de repas est libre. Tradition oblige.

Elise do Marcolino

Tous les articles des étudiants en journalisme sur l'économie autour du Chemin de Compostelle dans notre dossier spécial


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