Comme tous les groupements d’indépendants, Intersport a ses barons, ces adhérents à la tête de plusieurs dizaines de magasins, dont la fortune s’est construite en quelques décennies. Chez le numéro 2 français de la distribution d’articles de sport, l’Amiénois Bernard Joannin décroche ainsi la première marche du podium. Egalement président de l’Amiens Sporting Club, l’entrepreneur de 67 ans serait à la tête d’un empire de 350 millions d’euros, selon Jacky Rihouet, le PDG de la coopérative. Une croissance vertigineuse : en 2017, l’homme ne pesait « que » 180 millions d’euros. Mais, alors qu’Intersport a vu son chiffre d’affaires augmenter de 80 % en six ans, de 2 milliards à 3,6 milliards, son principal adhérent a suivi le rythme.
Lire aussiGo Sport : le tribunal de commerce choisit Intersport
Bernard Joannin dirige ainsi un total de 45 magasins dans toute la France. Il a également racheté sept points de vente Go Sport, sur les plus de 70 repris par Intersport lors de la banqueroute de l’enseigne, alors détenue par Michel Ohayon, en 2023. Les sept nouveaux magasins sont tous situés en Île-de-France.
Objectif Paris
Et c’est ce qui permet, d’ailleurs, à Bernard Joannin de continuer à faire grandir son empire. En effet, chez Intersport, il y a une règle d’or : un adhérent ne doit pas réaliser plus de 7 % du chiffre d’affaires visé par la coopérative dans son plan stratégique. Une manière de contrôler la croissance d’adhérents devenus trop puissants. Ainsi, l’objectif du plan stratégique d’Intersport étant d’atteindre les 4 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2024, la limite, normalement, est de 280 millions d’euros. Seulement voilà, il existe une exception. Pour inciter les entrepreneurs Intersport à se lancer à Paris, le PDG Jacky Rihouet a autorisé une dérogation : le chiffre d’affaires réalisé dans la capitale n’est pas pris en compte dans ce total de 280 millions d’euros.
En effet, jusqu’ici Intersport était en difficulté à Paris. Son seul flagship – déjà détenu par Bernard Joannin – avait fermé en 2019, laissant Decathlon régner seul en maître sur la capitale. Dès lors, il y a urgence à inciter les poids lourds de la coopérative à conquérir la capitale via notamment la transformation de magasins Go Sport. Bernard Joannin va donc jouer un rôle clé dans la conquête de cette ville stratégique et adorée des marques que vend Intersport, de Nike à Puma.
Lire aussiDecathlon : « un système opaque » pour continuer à vendre en Russie selon Disclose
Heureux chez Intersport, Bernard Joannin l’est un peu moins ces dernières années sur les terrains de football. Alors qu’il avait réussi l’exploit en 2017 de faire monter Amiens en Ligue 1, son club squatte désormais le ventre mou de la Ligue 2. De quoi agacer le dirigeant qui, le 14 avril, tweetait, en réaction à un match nul face à Concarneau : « Le non-match d’hier soir est consternant ». Le dirigeant lâche même, dans le même tweet, au sujet de ses joueurs : « Mettre en péril leur carrière comme ils l’ont fait est affligeant ! » Pas de doute, pour ouvrir des magasins comme pour diriger une équipe de football, Bernard Joannin n’y va pas avec le dos de la cuillère.