Pourquoi la culture vit un jour sans fin

La fameuse scène où Bill Murray fracasse son réveil en espérant pouvoir sortir ainsi de sa boucle temporelle. Un Jour sans fin, film d'Harold Ramis datant de 1993
La fameuse scène où Bill Murray fracasse son réveil en espérant pouvoir sortir ainsi de sa boucle temporelle. Un Jour sans fin, film d'Harold Ramis datant de 1993
La fameuse scène où Bill Murray fracasse son réveil en espérant pouvoir sortir ainsi de sa boucle temporelle. Un Jour sans fin, film d'Harold Ramis datant de 1993
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Le film culte « Un jour sans fin » résume ce sentiment très contemporain de répétition dans l’actualité. Un bégaiement généralisé qui touche aussi la culture.

Vous avez probablement vu ou entendu parler d’ « Un jour sans fin » : ce film culte de 1993 où Bill Murray se réveille inlassablement le même jour, tous les matins.

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« Un jour sans fin »  résume ce sentiment très contemporain de répétition dans l’actualité. Un bégaiement généralisé qui touche aussi la culture. C’est ma théorie.

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Nous nous réveillons donc inlassablement avec une nouvelle expo Picasso (16 étaient en cours cet été), ou une nouvelle expo Degas au Musée D’Orsay. « Degas et le nu » en 2012, « les danseuses de Degas » en 2017 et la semaine prochaine « Degas à l’Opéra », soit quasiment une tous les deux ans. En attendant peut-être « Degas et le bleu » en 2021 ? « Degas et le pastel » en 2023 ? Et puis pourquoi pas, axe moins reluisant, « Degas et l’affaire Dreyfus » en 2025 ?

Sur scène se développe aussi ce sentiment de boucle. Pour ne citer que quelques exemples : « Palace », mythique série des années 80 fera son retour ce vendredi au Théâtre de Paris, tandis que le chorégraphe Philippe Decouflé revisite lui-même ses 30 ans de création au Théâtre National de Chaillot toujours à Paris avec « Tout doit disparaître ».

Au cinéma et à Hollywood notamment, les films n’en finissent plus de se refaire et de se reprendre. Coppola avec une troisième version d’Apocalypse Now mais aussi Spielberg qui réalise un remake du West Side Story de 1961. Il se pourrait même que l'on revisite le cultissime "Princess Bride" mais l a rumeur a provoqué instantanément une levée mondiale de boucliers.

Pendant ce temps-là les séries continuent de se décliner en films et les films continuent de se décliner en séries. Le long métrage de la série « Dowtown Abbey » sortira sur grand écran la semaine prochaine et on annonce bientôt un « Once Upon a Time in Hollywood » de Tarantino en mini-série pour Netflix.

L’actualité culturelle a quelque chose du disque rayé

L’actualité culturelle a quelque chose du disque rayé. Et avec Disney ce principe de répétition atteint même le stade industriel. Après "Cendrillon", "La Belle et la Bête", "Le Livre de la Jungle", "Le Roi Lion", "Dumbo" ou encore "Aladdin", ce sera au tour du dessin animé "La Belle et la Clochard" de sortir en version prises de vues réelles le 12 novembre prochain sur la toute nouvelle plateforme Disney +. 

Cette culture qui se revisite sans cesse, le théoricien de la pop Simon Reynolds l’avait déjà analysée il y a quelques années dans son ouvrage « Rétromania »

Il y montrait que si la culture de la citation avait toujours existé, elle avait pris une importance jusqu’ici inégalée. Et le problème c’est qu’à force de se répéter la culture finit par se bloquer dans l’espace-temps, obstruant la voie de son propre futur. Même si, comme dans le film « Un jour sans fin », cette boucle infernale donne chaque fois l’occasion de déplier des possibilités inexplorées.

Mais j’ajouterai une dimension plus prosaïque qui me semble au moins applicable à Disney et peut-être plus largement encore. À l’heure où s’annonce une « guerre des plateformes de streaming », Disney, Apple et bientôt Warner rejoignant Netflix et Amazon, il faut à tout prix faire du stock et remplir les tuyaux. Dans ce contexte frénétique la tentation est grande de miser encore et encore sur la déclinaison des best-sellers du catalogue. Cette culture de la reprise, est donc aussi le signe d’une conception contagieuse de la culture comme « fournisseurs de contenus ». A quand le remake d'"Un jour sans fin"?

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