Pékin s’attaque à la liberté d’expression à Hong Kong

Pékin resserre encore l’étau sur Hong Kong. Le ministère chinois des affaires étrangères a demandé le 6 août 2018 au prestigieux Club des correspondants étrangers de Hong Kong (FCC) d’annuler une conférence d’Andy Chan programmée pour le 14 août. Une première depuis la rétrocession de l’ancienne colonie britannique à la République populaire de Chine le 1er juillet 1997.

Justification invoquée : « Le FCC ne doit pas donner la parole à son invité Andy Chan dont le parti est sur le point d’être interdit par le gouvernement car il constitue une menace pour la sécurité nationale. » Âgé de 27 ans, Andy Chan est le dirigeant du Parti national, fondé en mars 2016, qui milite pour l’indépendance de Hong Kong, un combat jugé « subversif » et « séparatiste » par les autorités chinoises.

Une institution journalistique unique en Chine

Lancé en 1943 dans la ville chinoise de Chongqing, le FCC avait déménagé à Hong Kong fin 1949 après l’arrivée des communistes en République populaire de Chine. Situé au cœur du quartier financier de l’île dans une ancienne bâtisse coloniale, ce club est une véritable institution pour tous les correspondants de presse étrangers basés à Hong Kong qui couvrent l’Asie. Il a connu ses grandes heures de gloire durant la guerre de Corée (1950-1953), la guerre du Vietnam (1955-1975) ou la chute de Phnom Penh en 1975.

Plusieurs photos historiques en noir et blanc de ces événements ornent les murs du restaurant bar du Club. Les plus grands journalistes américains, britanniques, australiens et européens s’y retrouvaient après leur mission sur ces lieux de guerre.

Fort de plus de 2000 membres (journalistes, diplomates, banquiers, hommes d’affaires), le FCC organise des conférences, des déjeuners-débats ou des rencontres avec une multitude de personnalités venant de toute l’Asie. Officiels chinois, dissidents vietnamiens, opposants politiques ou écrivains sont invités pour échanger et parler de la réalité de leur pays.

Le refus du FCC au nom de la liberté d’expression

En réponse aux demandes d’annulation de la conférence d’Andy Chan le 14 août prochain, le Conseil du FCC a clairement refusé de se plier à ces injonctions : « Nous croyons que dans des sociétés libres comme Hong Kong, il est vital de permettre à n’importe qui de s’exprimer et de débattre librement, même si on peut être en désaccord avec leurs idées. »

La requête de Pékin, véhiculée par la chef de l’exécutif Carrie Lam et son prédécesseur Leung Chun-ying (ancien membre du FCC), intervient à un moment où la Chine ne cesse de renforcer sa mainmise sur l’ex-colonie qui, en vertu de l’accord de rétrocession passé avec Londres, devrait jouir d’une semi-autonomie et de libertés inconnues sur le continent chinois. Le ministère chinois se dit « opposé à ce que des forces extérieures offrent une plateforme pour que des éléments de “l’indépendance hongkongaise” propagent leurs mensonges ».

Le dernier gouverneur britannique de Hong Kong Chris Patten, dans un message envoyé à l’Agence France-Presse, a déploré cette attitude. Il s’affirme opposé à l’indépendance de Hong Kong mais défend « en même temps les libertés et l’autonomie locales ».