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Le paradis sur mer

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Gilles Martin-Chauffier

Le Morbihan est le jardin d’Eden de la Bretagne. Le plus breton de nos chroniqueurs en est certain.

Quittons la France. Rien de plus facile. Réfugions-nous dans le seul département qui porte un nom étranger. J’ai cité le Morbihan, « petite mer » en breton. Dire qu’à la Révolution il a failli s’appeler « Côtes du Midi », tout comme la région de Saint-Brieuc devenait les « Côtes du Nord ». Heureusement les dieux veillaient et nous ont épargné cette niaiserie. Il faut dire qu’il y a très longtemps que ces mystérieux personnages sont ici dans leurs meubles. Bien avant qu’ils se piquent d’aller rôtir dans la fournaise égyptienne, ils prenaient leurs aises entre mer et forêt, face à la baie de Quiberon. Cairns, dolmens, menhirs, cromlechs sont des centaines dans les parages. A Carnac, bien sûr, mais à mille autres endroits aussi. Les archéo-dieux paléoceltiques adoraient les forêts profondes, les mares moussues, l’obscurité humide et, juste à côté, de belles plages ensoleillées. Bien avant les producteurs du « Seigneur des anneaux », ils avaient compris que la vraie Nouvelle-Zélande est à deux heures de TGV de Paris – qui, à l’époque, allait s’appeler Lucette. Et, en effet, c’est le paradis sur terre. Si quelqu’un prononce le mot pluie, haussez les épaules. Il ne fait jamais mauvais temps autour de Vannes ; au pire, il y a de mauvaises bottes.

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C’est moderne et ancien, mer et campagne, vert et bleu...

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Côté climat, c’est simple : il n’y a que deux saisons. Un hiver très très doux et un interminable printemps aux teintes des 800 variétés d’hortensias variant du bleu ardoise au pourpre impérial. Pas de moustiques, de canicule, de bobs Ricard et de bisous à l’ail. Personne ne songe à se fâcher avec le soleil à cause des nuages car un petit zef ne manque jamais de les ­chasser. Ils ­reviennent, du reste. Mais ne dérangent pas. Ici, tout est tranquille. Dans l’Argoat, c’est-à-dire dans les terres, de paisibles rivières se traînent avec des langueurs féminines entre de tendres prairies. Cela dit, sur la côte, l’Arvor, l’océan peut se ­révéler plus viril et on sent que ces régions forment aussi des durs à cuire. On est quand même chez ­Cadoudal. Entre 1793 et 1800, ses ­copains, Sabre-Tout, Sans-Quartier, Rude-au-Feu, Belle-Etoile, Saute-Partout, la Perdrix et Fleur-de-Chêne n’ont pas ­apprécié que les Bleus viennent les chercher. Avec une belle sensibilité à la Robespierre, ils en ont fait voir de toutes les couleurs à ceux qui s’aventuraient sur leurs chemins creux.

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Et puis, comme les autres, ils se sont calmés. Dans un tel décor, pourquoi s’énerver ? Le XIXe siècle et la première moitié du XXe ont été la providence du Morbihan : ­aucune invasion pour ­détruire les merveilles architecturales passées. Et, en prime, un sommeil économique si lourd, quasiment comateux, qu’il a préservé ses villes de tout aménagement ravageur. Bienvenue au conservatoire des maisons à pans de bois et des chapelles aux enclos paroissiaux de granit sculpté. Pas de ­panique, pourtant. On est bien en 2016. A Lorient, la DCNS ­fabrique des sous-marins et des frégates pour le monde entier et, à Vannes, Multiplast lance des formules 1 sur toutes les mers. Bref, c’est moderne et ancien, mer et campagne, vert et bleu, et cela donne un album exceptionnel. Avec des photos de forêts dignes de Merlin et d’autres de plages idéales pour les fées en Lycra, des textes en français et des pages en breton. A consommer avec un bon verre. Car, ­attention, par là-bas, ne pas boire un petit coup, c’est comme dire qu’on n’aime pas les enfants. Ça ne se fait pas. C’est de la haute civilisation.

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