Rien qu’en 2020, le gouvernement américain a consacré 4,5 milliards d’euros à la recherche et au développement de l’intelligence artificielle [IA, voir encadré ci-dessous]. Selon les données de la société PitchBook, entre 2012 et 2018, le pays a investi vingt fois plus dans l’IA et le big data que l’Europe. L’argent des investisseurs privés dans ce domaine va lui aussi principalement aux États-Unis : en 2018, le pays de l’Oncle Sam a attiré 46 % des investissements privés, la Chine 38 %. Pendant ce temps, selon le bureau d’études McKinsey, l’Europe n’en recevait que 8 %.

Il n’est dès lors pas surprenant de constater que dix-huit des vingt-cinq principaux clusters de recherche sur l’IA se trouvent en Amérique du Nord. Pékin, quatrième dans la liste, est l’un des quatre clusters asiatiques dans le top 25. Il en reste donc trois pour l’Europe, dont un se trouve à Londres, qui a depuis quitté l’UE.

Les investissements dans l’IA ont encore fait un bond en avant pendant la pandémie de Covid-19. D’énormes investissements ont été réalisés, notamment dans les applications médicales telles que le développement de médicaments et de vaccins, là aussi à l’initiative des États-Unis et de la Chine. L’autre grande tendance de 2020, les progrès des modèles de traitement automatique des langues, est aussi une particularité presque exclusivement américaine.

“J’ai l’impression que l’Europe prend chaque jour un peu plus de retard”, confie le professeur émérite Luc Steels, l’un des pionniers de l’IA en Belgique. Il juge l’approche européenne “excessivement lente et bureaucratique”. Selon lui, non seulement l’Europe ne consacre pas assez d’argent à l’IA, mais elle s’y prend mal. Le système européen traditionnel, fondé sur le financement par projet, ne fonctionne pas pour ce domaine qui évolue extrêmement rapidement.

Dès l’annonce d’une découverte ou d’une avancée dans le domaine de l’apprentissage profond [o