Economie

Les banques seront-elles encore en mesure de prêter en 2021 ?

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Par Maxime Paquay

Les banques étaient attendues au tournant pendant cette crise. Le rôle qu’on leur a demandé de jouer : continuer de prêter aux ménages, aux entreprises, et être – en partie – la solution, pour continuer à porter et à soutenir une économie mise sur pause. Et le patron de Belfius de dégainer ses chiffres, d’abord concernant le moratoire sur les crédits (les reports de remboursement du capital, des emprunts pour les entreprises). Pour Marc Raisière, c’est "mission accomplie".

Les banques ont-elles joué leur rôle pendant cette crise sanitaire ?

Marc Raisière : " Absolument. A titre d’exemple, nous avons allégé via le moratoire sur les crédits, la charge des entreprises pour un montant, au niveau de Belfius, de plus ou moins 500 millions d’euros.

Si nous considérons que Belfius a une part de marché de 18%, ça signifie, au niveau du secteur, quasiment trois milliards d’euros. Un montant que les entreprises ou les entrepreneurs n’ont pas dû rembourser durant cette année 2020. C’est absolument substantiel. "

Et quoi maintenant ? On sait que toute une série de ces crédits en cours seront à un moment donné non productifs. C’est une période de tempête qui s’annonce pour les banques ?

M.R. : " Ce serait effectivement une période de tempête, si les banques belges n’étaient pas suffisamment capitalisées. Nous sommes en réalité très éloignés de la période qui remonte à dix ans où les banques belges étaient sous-capitalisées.

Et cela nous permet d’affronter cette crise avec énormément de sérénité. Certes, une entreprise comme Belfius a mis des provisions pour faillites futures — un montant important, 450 millions d’euros — mais malgré cela, nous resterons à la fin de cette année une des banques les mieux capitalisées au niveau européen, voire au niveau mondial. "

A la question "est-ce que les banques vont continuer à prêter", votre réponse est donc "oui" ?

M.R. : " Nous avons même un intérêt au niveau des banques à soutenir les entrepreneurs dans leur stratégie d’investissements. Et effectivement, avec les capitaux dont nous disposons, nous allons continuer à irriguer l’économie belge.

Un exemple : cette année, notre banque aura octroyé plus de huit milliards d’euros de crédits, à côté des moratoires. Cela signifie que nous avons octroyé plus de 10% en plus que l’exercice précédent. Je suis donc très satisfait, dans un environnement très anxiogène, de pouvoir affirmer que nous avons joué notre rôle – pour passer cette crise majeure. "


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Les mauvaises langues vous rétorqueraient que les banques sont aujourd’hui presque payées pour prêter de l’argent…

M.R. : " Si cela pouvait être aussi simple. Vous savez, lorsque la Banque centrale nous met des facilités de tirage de lignes à – 1%, c’est aussi accompagné par un environnement de taux négatifs. Quelque part, la Banque centrale nous aide à affronter un environnement de taux qui est extrêmement préjudiciable pour le secteur bancaire et de l’assurance.

C’est donc trop aisé, trop facile, de réduire l’effort du monde bancaire dans un environnement de taux qui n’a jamais été aussi challenging pour lui. "

Que pensez-vous de cette idée de "bad bank", qui circule depuis plusieurs mois, une gigantesque cuve dans laquelle seraient placés tous ces prêts défaillants en provenance de l’ensemble du système bancaire européen ?

M.R. : " Je ne suis pas favorable, et je dirais même pas favorable du tout, à une mutualisation de ces "non-performing loans", de ces crédits qui ne seraient pas remboursés. Pour deux raisons. La première, c’est que cela déresponsabilise les dirigeants des banques de bien faire leur métier. Notre métier est un métier qui, comme beaucoup d’autres, est complexe et il nous appartient de bien le gérer.

Le deuxième élément est qu’aucune des banques n’aura d’impact sur la manière avec laquelle cette bad bank sera gérée. Ces deux raisons me font dire que ce n’est pas la solution dont le monde bancaire européen a besoin aujourd’hui. "

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