Philippe Vallée (Gemalto) : « Nous réfléchissons déjà à l'informatique quantique »

INTERVIEW. L'entreprise, basée aux Pays-Bas et spécialisée dans la sécurité numérique, a dit oui à Thales, après avoir refusé l'offre d'Atos.

Propos recueillis par

Philippe Vallée, PDG de Gemalto

Philippe Vallée, PDG de Gemalto

© George Brooks

Temps de lecture : 4 min

Lecture audio réservée aux abonnés

En lançant une offre d'achat sur Gemalto, Atos a expliqué qu'il voulait devenir un « leader mondial en cybersécurité, technologies et services numériques ». Problème, Gemalto estime que les 4,3 milliards d'euros proposés ne sont pas suffisants. Gemalto, premier fabricant mondial de cartes SIM, est basé à Amsterdam aux Pays-Bas et compte 14 000 salariés, alors que Atos, leader européen du Cloud, de la cybersécurité et du supercalcul, possède son siège à Bezons, près de Paris, et s'appuie sur 100 000 collaborateurs. Hier, Thierry Breton, numéro un d'Atos, a tenu à rassurer en expliquant au Parisien qu'il s'engageait « à préserver chaque emploi chez Gemalto ». Le refus de Philippe Vallée sera-t-il définitif ? Le numéro un de Gemalto répond au Point.fr.

Le point du soir

Tous les soirs à partir de 18h

Recevez l’information analysée et décryptée par la rédaction du Point.

Votre adresse email n'est pas valide

Veuillez renseigner votre adresse email

Merci !
Votre inscription a bien été prise en compte avec l'adresse email :

Pour découvrir toutes nos autres newsletters, rendez-vous ici : MonCompte

En vous inscrivant, vous acceptez les conditions générales d’utilisations et notre politique de confidentialité.

Le Point.fr : Êtes-vous rassuré par les dernières déclarations de Thierry Breton dans Le Parisien ?

Philippe Vallée : Je ne veux pas entrer dans un jeu de questions-réponses médiatique. Le conseil d'administration de Gemalto pense toujours que l'offre d'Atos est sous-évaluée au niveau du prix. Les perspectives proposées ne sont par ailleurs pas très claires. L'idée de découper Gemalto en plusieurs parties ne correspond pas à ce que l'on pourrait obtenir de manière autonome. Les experts en sécurité travaillent mieux en équipes intégrées que séparées. Les deux entreprises ont des business models très différents. Atos est une société de services informatiques, efficace et performante. Nous sommes partenaires, clients et fournisseurs d'Atos, donc nous les connaissons bien. Gemalto est de son côté une entreprise qui vend des produits. Il aurait été préférable d'apprécier ces différences avant de faire cette proposition. J'aurais préféré en discuter en amont de façon plus constructive et de manière privée avec l'équipe stratégique qui conseille monsieur Breton. C'est pour cela que nous avons posé toute une série de questions qui méritent des réponses.

Mais vous n'êtes pas en grande forme aujourd'hui...

Nous avons traversé une situation difficile à cause de l'évolution des cartes SIM. Mais nous avons d'ores et déjà des offres qui nous permettent de grandir de manière autonome, et c'est ce que nous allons présenter le 13 mars prochain à l'occasion de la présentation de notre plan stratégique. Gemalto s'est ainsi recentré autour de la protection des données, de l'identité ou encore de la sécurisation des objets connectés. Tout en réduisant nos dettes, nous avons réalisé trois acquisitions importantes dans ces domaines, dont la dernière en date dans la biométrie. Ces nouveaux marchés représentent nos moteurs de croissance.

En vous rachetant, l'alliance donnerait naissance à un géant basé en France, un exemple de patriotisme économique. Plutôt astucieux pour proposer une offre alternative aux Gafa, non ?

Que l'on veuille créer des champions français ou européens pour contrer la puissance des Google, Amazon ou Facebook, je trouve cela bien. Mais comme je l'ai dit, Gemalto et Atos ont des business models qui restent différents.

Êtes-vous sûr d'avoir les reins assez solides pour résister tout seul ?

Nous le pensons. Nous avons le lien commercial avec un certain nombre de clients qui font face à la digitalisation de leurs services et nous avons la capacité de les accompagner. Pour schématiser, il y a le « cloud », d'un côté, et les objets et les personnes, de l'autre. Gemalto assure la sécurité et l'anonymat quand cela est souhaitable entre ces deux éléments. Nous assurons cette mission de lien sécurisé dans le domaine de la téléphonie mobile, de la banque, des services gouvernementaux et pour toute entreprise.

Très bien, mais la blockchain ne va-t-elle pas totalement redéfinir ce nouveau lien de confiance ?

C'est un nouveau paradigme qui va bouleverser le monde actuel et qui nécessite beaucoup de clés privées. Il se trouve que Gemalto est un expert dans la protection de ces clés. Donc, plus la blockchain va se déployer, plus on sera amenés à acheter nos solutions.

L'état-major d'Atos explique également que votre alliance aurait permis d'être mieux armé à l'ère du quantique.

Il a raison de dire que l'ordinateur quantique va apporter une force de calcul démultipliée. S'en protéger, c'est un peu la course perpétuelle entre l'épaisseur de la cuirasse et la vitesse du boulet. Nous avons l'habitude de cette accélération dans la cryptologie. La carte SIM de 1992 n'a rien à voir avec la nouvelle génération de SIM embarquées dans les montres connectées. Lorsque l'informatique quantique sera accessible au grand public, ce qui ne sera pas le cas avant cinq à dix ans, nous aurons mis au point des algorithmes capables de lui résister. Nous y réfléchissons déjà.

Ce service est réservé aux abonnés. S’identifier
Vous ne pouvez plus réagir aux articles suite à la soumission de contributions ne répondant pas à la charte de modération du Point.

0 / 2000

Voir les conditions d'utilisation

Commentaire (1)

  • atchadji

    S'ignorant superbement lui-même, l'humain s'isole pour ne s'associer qu'à la condition d'être "en sécurité", c'est-à-dire qu'il lui reste son isolement, sa vie privée connectée à un Cloud-quantique qui ne peut être différent de l'univers lui-même.