(Ottawa) La vice-première ministre Chrystia Freeland s’inquiète du fait que Washington renvoie dans leurs pays d’origine des demandeurs d’asile irréguliers qui sont refoulés à la frontière en vertu de l’accord conclu sur la fermeture de la traverse.

La semaine dernière, le gouvernement Trudeau en a surpris quelques-uns en annonçant que l’entente conjointe intervenue dans le contexte de la lutte contre la pandémie de la COVID-19 comprenait cette clause.

On a assuré qu’il n’y avait nulle raison de craindre pour le sort ultérieur de ces migrants. « Ils seront tout simplement retournés aux États-Unis », a notamment argué le ministre de la Sécurité publique Bill Blair.

Or, il semble que certains seront renvoyés dans leur pays d’origine, selon ce qu’a signalé à l’agence le Service des douanes et de la protection des frontières (CBP) des États-Unis à l’agence Reuters.

« Si un étranger ne peut être renvoyé au Mexique ou au Canada, nous travaillerons avec nos partenaires d’autres agences pour assurer un retour de l’étranger vers son pays, et garder l’étranger sous notre supervision le moins longtemps possible », a-t-on indiqué.

Invitée à commenter cette information, Chrystia Freeland a affirmé vendredi que l’enjeu faisait « l’objet de discussions urgentes avec nos partenaires américains », disant que le Canada « au courant des problèmes de refoulement ».

Esquivant la question d’une journaliste qui lui demandait si Ottawa était au courant de cette en concluant l’accord avec Washington, elle a assuré qu’il était « très important pour le Canada de respecter ses engagements internationaux sur les réfugiés ».

La numéro deux du gouvernement libéral n’a pas non plus voulu dire si cette disposition de l’accord pourrait être annulée si la situation perdurait : « Il est toujours mieux que les négociations se déroulent en privé, et je ne veux pas me lancer dans des hypothèses ».

« Pas étonnant »

Lorsque le gouvernement a annoncé que les migrants comme ceux qui traversent par le chemin Roxham seraient dorénavant renvoyés, et ce, jusqu’à nouvel ordre, la directrice générale d’Amnistie internationale au Canada, France-Isabelle Langlois, a été choquée.

Vendredi, elle s’est dite « outrée » lorsque La Presse l’a contactée.

« Mais si vous me demandez si je trouve ça étonnant venant des États-Unis, la réponse est non. C’est ce qu’on craint depuis le début, avant même le coronavirus. Ce n’est pas un pays sûr pour les réfugiés », a-t-elle laissé tomber.

Elle est convaincue que cette politique contrevient aux obligations internationales du Canada, dont la Convention relative au statut des réfugiés des Nations unies, qui a été adoptée en 1951.

L’entente entre le Canada et les États-Unis entrée en vigueur 21 mars dernier, scelle la frontière à tous les étrangers dont les déplacements ne sont pas essentiels. À l’issue de la période initiale de 30 jours, elle doit faire l’objet d’un réexamen.

À Ottawa, tous les partis d’opposition s’étaient ralliés à la décision des libéraux de Justin Trudeau concernant les arrivées irrégulières au pays. Le NPD est toutefois d’avis qu’elle doit être révisée une fois que la menace de la COVID-19 sera dissipée.