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Et si vous aviez écouté, président Macron ?

En octobre 2018, Jaqueline Mouraud apprend qu’une nouvelle taxe sur le carburant va entrer en vigueur. Elle se sent acculée par toutes ces impositions et elle veut pousser un coup de gueule. Elle décide de tourner une vidéo et de la poster sur ses réseaux sociaux. Face caméra, elle exprime son ras-le-bol. Elle a l’impression de payer toujours plus, alors que le gouvernement français favorise les classes aisées.

Sa capsule réalisée en mode selfie et postée sur son compte Facebook comptabilise plus de cinq millions de vues. En deux semaines, Jacqueline se retrouve propulsée sur le devant de la scène. Elle se transforme en porte-parole de cette classe moyenne qui se sent sous pression.

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Du côté de l’Elysée, la vidéo est repérée très rapidement, Benjamin Griveaux, alors porte-parole du gouvernement français, explique: «À partir du moment où la vidéo fait 100’000 vues en 24 heures vous comprenez très vite qu’elle est virale».

Les équipes de communication d’Emmanuel Macron décident de mettre en place une surprenante stratégie de réponse. Pas question que le président réponde en direct. Le 4 novembre 2018, la nouvelle secrétaire d’État à la transition écologique, Emmanuelle Wargon, s’y colle. Cette novice en politique respecte les codes que Jacqueline a imposés: face caméra et en mode selfie.

«Je rends visite à mon fils qui étudie à Londres, je suis dans une chambre d’étudiant avec mon smartphone. J’ai fait deux prises dans ces conditions-là qui n’étaient pas complètement idéales. C’est un truc assez spontané et pas du tout préparé. Je suis avec ma famille j’essaie juste de répondre», indique ensuite Emmanuelle Wargon.

L’opinion publique juge ses déclarations insuffisantes. Effet manqué. Pire, cette vidéo attise la rancœur contre le chef d’Etat et assoit son image de roi Macron.

Le 6 novembre 2018, le président assiste à Verdun aux commémorations de l’armistice de la fin de la Première guerre mondiale. À cette occasion, il se fait alpaguer par un retraité, Willam Marchal, 66 ans. Il met en garde Emmanuel Macron devant un parterre de journalistes: «Sentez-vous ce malaise qui monte?» Déconcertante réplique de Macron: «La taxe du carburant, ce n’est pas bibi», sourit-il.

Macron n’a jamais été un élu. Il ne possède pas les filtres sociaux qui délivrent la réalité provenant du terrain. Son équipe de communication perd pied. Les gilets jaunes, eux, sont efficaces sur les réseaux sociaux. Ils mobilisent rapidement des milliers de personnes. Les groupes facebook pullulent sans aucune structure, mais avec un leitmotiv: «On en a marre». Et ils lancent l’épreuve de force en paralysant les principaux axes routiers. Les premiers heurts ont lieu le 17 novembre.

Pendant ce temps, à L’Élysée, on prépare le prochain voyage d’Emmanuel Macron pour l’Argentine. Il doit y rencontrer son homologue Mauricio Macri avant le début du G20.

À Paris, le 27 novembre 2018, Macron s’exprime sur la transition écologique. Il a en sa possession plusieurs versions de discours, dont un qui va dans le sens des manifestants: «Tant que nous n’aurons pas trouvé de solutions, je n’accepterai pas de hausse de l’essence.»

Cette version appelle au compromis. Elle aurait pu apaiser les esprits, mais à la dernière minute, il préfère ces termes: «Je veux, ici, dire que je ne confonds pas ces actes inacceptables avec la manifestation sur laquelle ils se sont greffés. Je ne confonds pas les casseurs avec des concitoyens qui veulent faire passer un message. J'éprouve de la compréhension pour ces concitoyens, mais je ne céderai rien à ceux qui veulent la destruction et le désordre, car la République, c'est à la fois l'ordre public et la libre expression des opinions.» Le ton est ferme. Nouvelle erreur de la part du président qui se pose en chef de guerre face à son peuple en colère.

Le 29 novembre 2018, pour ne rien arranger, le président est victime d’un couac diplomatique dès l’atterrissage de son avion en Argentine. Aucune délégation officielle n'est présente pour le recevoir. Devant la presse, qui commente son arrivée, Macron serre la main à un employé de l’aéroport qui porte à ce moment-là…. un gilet jaune.

L’image fait le tour du monde et ridiculise le président . Les réseaux sociaux ironisent. L’équipe de communication de Macron ne réagit pas à ce qui aurait dû être un vrai signal d’alarme.

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Samedi, 1er décembre 2018, l’acte 3 des gilets jaunes se déroule telle une tragédie. Dès 11 heures, la rébellion dégénère. Les gilets jaunes affrontent les forces de l’ordre. C’est violent. La capitale française est à feu et à sang. Les réseaux sociaux sont les témoins privilégiés de la bataille. Le bilan est lourd: 239 départs de feu, 412 interpellations et 153 blessés. L’Arc de Triomphe est attaqué et saccagé.

Alors que les yeux du monde sont braqués sur Paris, Macron parait incroyablement détendu à l’autre bout de la planète. Une attitude totalement arrogante.

Macron s’adresse à la presse, il prend soin de classer par priorité d’importance les thématiques qu’il aborde. Premièrement le climat, puis le commerce, les condoléances qu’il présente aux États-Unis pour la perte du président Bush senior qui vient de mourir et seulement alors, il aborde les gilets jaunes. Il ne s’adresse pas à son pays mais à la communauté internationale: «Ce qui s’est passé à Paris n’a rien à voir avec une colère légitime. Les coupables veulent le KO.» Puis, le président refuse tout simplement de répondre aux questions des journalistes sur cette thématique.

Comment des professionnels de la communication peuvent laisser un chef d’Etat se tromper pareillement? C’est un suicide en termes d’image.

C’est lors de son voyage de retour que l’un de ses proches conseillers lui montre les dégâts faits à l’Arc de Triomphe. Macron prend enfin conscience que son peuple est au bord de la révolution.

Le 4 décembre, il se rend dans la commune du Puy-en-Velay (Auvergne-Rhône-Alpes). Il souhaite visiter la mairie qui a été le théâtre de violents affrontements. Le 1er décembre, l’annexe du bâtiment a été incendiée par des gilets jaunes.

Il arrive à 16h par avion. Il passe deux heures avec les employés encore traumatisés. À l’extérieur, ça fuite. Jérôme, un des activistes de la région, est prévenu. Il envoie quelques sms et mobilise rapidement des partisans.

Lors du départ de Macron, ce dernier descend sa fenêtre de voiture pour saluer la foule qui appelle à sa démission. Le président, pour la première fois, comprend que le peuple ne l’aime pas. Pire, certains le haïssent. Sa sécurité physique est menacée.

La sécurité du président prend la décision de ne pas foncer sirènes hurlantes. Non, Macron ne fuit pas. Il s’en va. C’est aussi avec ses actions que se façonne l’image d’un chef d’Etat.

Pourtant à un moment donné, le cortège présidentiel accélère, roulant même à contresens. Roger surgit alors. Un gilet jaune, sans emploi, il tape sur toutes les voitures du cortège. Roger confiera au micro des médias: «J’avais la haine ».

Les services du Président, ne prenant pas les menaces à la légère, annulent dès lors ses déplacements.

L’acte 4 se joue le 8 décembre 2018. Macron est barricadé à l’Élysée alors que les groupes facebook appellent à aller le chercher dans son palais.

Les équipes présidentielles dédiées au digital sont sur le pied de guerre. Elles s’interrogent sur une influence étrangère russe, le nom de Steve Bannon circule également. Chaque message est passé au crible et analysé. Et pourtant, il faut se rendre à l’évidence, le mal qui ronge la France vient de France.

Les blindés de le gendarmerie sont déployés dans Paris. Macron est stressé et amaigri. Il ne sortira pas.

Le 10 décembre, après une réunion avec quelques vieux briscards de la politique comme Richard Ferrand, Jean-Paul Delavoye, Philippe Orangeon ou Francois Bayrou, Macron comprend qu’il doit lâcher du lest.

ll déclare ce soir-là aux Français: «Le salaire d'un travailleur au smic augmentera de 100 euros par mois dès 2019 sans qu'il en coûte un euro de plus pour l'employeur.»

En réalité, cette annonce ne change pas grand-chose et l’effet de manche souhaité ne fonctionne pas.

Le lendemain matin, Muriel Pénicaud, ministre du travail, est invitée au Grand entretien de Léa Salamé et Nicolas Demorand. C’est le drame! Pas préparée, la ministre se perd. Son intervention est ratée.

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Emmanuel n’a plus le choix, il doit aller à la rencontre des Français. Il organise son Grand débat. Son idée: sillonner le pays à la rencontre des maires. Il utilise alors les mêmes mécanismes de communication qui ont fait son succès lors de sa campagne présidentielle.

La lettre du 13 janvier 2019 se veut manuscrite, Emmanuel Macron exprime son envie de parler aux français. Au final, un original communiqué de presse.

Après avoir envoyé une lettre aux Français, il débute son tour de France en Normandie devant 600 maires. Macron note méthodiquement les différentes remarques. Il écoute. Puis, il prend la parole. Il retire sa veste visiblement à l’aise pour ce qui est une belle opération de communication. Les médias sont au rendez-vous et c’est l’effet que vise Macron.

A-t-il réussi? Un an plus tard, Macron n’a toujours pas trouvé la clé pour calmer la France. «C’est le système français», se justifie-t-il dans une interview accordée au Time en septembre 2019. «Dans notre pays, on aime le pouvoir, mais on veut tuer les dirigeants. Mon défi est d’écouter plus les gens que je ne l’ai fait au début, d’avoir une méthode qui n’est pas juste de réformer pour le pays mais de reformer avec le pays.»

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